Dimanche de la Passion (année A), Matthieu (26 passim)
1 Alors, quand Jésus a achevé toutes ces instructions, il dit aux disciples:Vous savez que dans deux jours vient la Pâque 2 et le Fils de l’homme va être livré pour être crucifié. 3 C’est alors que les grands-prêtres et les Anciens du peuple
se réunissent dans le palais du Grand-prêtre, le nommé Caïphe. 4 Ils se concertent pour se saisir de Jésus par ruse et le tuer. 5 Mais ils disent: Pas pendant la fête afin qu’il n’arrive pas un tumulte dans le peuple.
… 14 C’est alors que l’un des Douze, le nommé Judas Iscariote,
se rend auprès des grands-prêtres. 15 Il dit: Que voulez-vous me donner? et moi je vous le livrerai.
Ceux-ci lui pèsent trente pièces d’argent. 16 Dès lors il cherche une occasion favorable pour le livrer.
… 20 Le soir venu, [Jésus] est attablé avec les Douze. 21 Pendant qu’ils mangent, il dit: Amen! je vous le dis: l’un de vous me livrera. 22 Fort attristés, ils commencent, chacun, à lui dire: N’est-ce pas moi, Seigneur? 23 En réponse, il dit: Qui plonge avec moi la main dans le plat, celui-là me livrera.
… 25 Judas, qui est en train de le livrer, répond: Serait-ce moi, Rabbi?
Il lui répond: Tu l’as dit! 26 Pendant qu’ils mangent, Jésus ayant pris du pain et prononcé la bénédiction,
il le partage et l’ayant donné aux disciples il dit:
Prenez, mangez, ceci est mon corps. 27 Prenant une coupe et ayant rendu grâce, il leur donne en disant:
Buvez tous à cette [coupe]. 28 Car ceci est mon sang, celui de l’alliance, versé pour la multitude,
pour le pardon des péchés.
… 31 Alors, Jésus leur dit:
Cette nuit même, vous tous, vous allez chuter à cause de moi.
Il est écrit en effet: «Je frapperai le pasteur
et les bêtes du troupeau seront dispersées.» 32 Mais après avoir été réveillé [de la mort], je vous précéderai en Galilée. 33 Pierre répond et lui dit: Si tous chutent à cause de toi, moi, jamais, je ne chuterai. 34 Jésus lui déclare: Amen, je te dis
que cette nuit même, avant le chant du coq, trois fois tu me renieras! 35 Pierre lui dit: Même si je devais mourir avec toi, non, je ne te renierai pas!
Et tous les disciples disent la même chose. 36 Alors Jésus va avec eux dans un domaine appelé Gethsémani.
Il dit aux disciples: Asseyez-vous ici pendant que je m’éloigne pour prier. 37 Il prend avec lui Pierre et les deux fils de Zébédée.
Il commence à ressentir tristesse et angoisse. 38 Alors il leur dit: Mon âme est triste, triste à mourir. Restez ici et veillez avec moi. 39 S’avançant un peu il se prosterne, en priant ainsi:
Mon Père, si c’est possible, que cette coupe passe loin de moi!
Pourtant, non comme moi je veux, mais comme toi… 40 Il vient vers les disciples et les trouve endormis.
Il dit à Pierre: Ainsi, vous n’avez pas eu la force de veiller une seule heure avec moi?
Veillez et priez pour ne pas entrer dans l’épreuve.
… 47 Il parle encore quand arrive Judas, l’un des Douze, et avec lui toute une troupe. … 49 S’approche aussitôt de Jésus, il dit: Salut, rabbi! et il l’embrasse. 50 Jésus lui dit: Ami, c’est pour cela que tu es présent… 51 Alors ils s’approchent, mettent la main sur Jésus et l’arrêtent.
… 57 Ceux qui ont saisi Jésus l’emmènent chez Caïphe, le grand-prêtre,
là où les scribes et les Anciens se sont réunis. 58 Pierre suit de loin jusque dans la cour du grand-prêtre.
Il entre à l’intérieur et s’assoit avec les gardes pour voir le dénouement.
… 69 Une servante s’approche de lui en disant: Toi aussi, tu étais avec Jésus, le Galiléen! 70 Lui nie devant tous, disant: Je ne sais pas de quoi tu parles? 71 Comme il sort vers le portail, une autre le voit et dit à ceux qui sont là:
Celui-ci, il était avec Jésus le Nazôréen! 72 Il nie à nouveau et jure: Je ne connais pas la personne! 73 Peu après, ceux qui se tiennent là s’approchent
et disent à Pierre: Pour de vrai… toi aussi tu en es!
D’ailleurs, ton accent te fait repérer. 74 Alors il se met à sacrer et à jurer: Je ne connais pas la personne!
Et aussitôt un coq chante. 75 Pierre se souvient de la parole de Jésus qui avait dit:
«Avant le chant du coq, trois fois tu m’auras renié.»
Il sort au dehors et il pleure amèrement.
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Le commentaire du pain sur la table,
par Georges Convert.
Je ne connais pas cette personne!
Comment est-il possible que Pierre ait dit cette phrase?
Comment Pierre peut-il renier, en une nuit, des mois de communion et d’amitié?
Est-ce par lâcheté? Par peur?
N’a-t-il pas promis de combattre? Et même pris l’épée au jardin de Gethsémani?
N’est-il qu’un fanfaron? Je ne te renierai jamais, même si tous t’abandonnent!
Son amitié était-elle trop faible, trop superficielle?
Mais tous les récits de l’Évangile semblent nous dire le contraire.
C’est dans sa maison que Jésus réside à Capharnaüm.
C’est dans sa barque qu’il enseigne au bord du lac.
C’est lui qui a dit à Jésus: À qui irions-nous, tu as des paroles de vie éternelle! (Jn 6,68).
Jésus lui a donné le surnom de Roc et c’est à lui qu’il confie le soin de paître son troupeau:
Simon, tu es Pierre et sur cette pierre j’établirai mon assemblée (Mt 16,18).
C’est lui, avec Jacques et Jean, qui se trouvera sur la montagne de la transfiguration.
Alors? Comment comprendre qu’au moment crucial où Jésus est arrêté,
Pierre puisse dire cette phrase: Je ne connais pas cette personne!
Mais de quelle personne s’agit-il?
C’est que, tout-à-l’heure, Pierre a vu Jésus écrasé par la souffrance.
Il l’a vu angoissé, suant le sang devant la mort, triste à mourir.
Il l’a vu Jésus refusé de se défendre, comme un faible.
Ou un non-violent: Qui prend l’épée, périra par l’épée, a dit Jésus.
Il l’a vu se livrer lui-même à une bande de bandits venus
au nom d’une petite clique de chefs religieux plutôt détestés par le peuple.
Il aurait pu se défendre, neutraliser les gardes et soulever les foules.
Ces foules, ne l’auraient-elles pas défendu?
Au contraire il a vu Jésus -humilié, bafoué comme un vaurien- rester muet,
se taisant comme un agneau qu’on mène à l’abattoir!
Tout-à-l’heure, il a vu Jésus accusé de blasphème, d’outrage à Dieu…
ce Jésus que lui, Pierre, a reconnu comme le Christ, le Fils du Dieu vivant (Mt 16,16).
Mais ce n’est pas la première fois que Pierre refuse de connaître cette personne-là.
Quand Jésus a annoncé pour la première fois
qu’il avait décidé d’aller à Jérusalem et de se livrer aux prêtres et aux Anciens,
Pierre a spontanément réagi: Dieu t’en préserve! Il ne faut pas que cela arrive (Mt 16,22).
Et Jésus, alors, l’avait violemment traité de Satan!
Comment expliquer ce que ressent Pierre?
Ne lui est-il pas difficile de comprendre pourquoi Jésus a choisi ce chemin de la croix?
Jésus peut-il devenir le contraire de Celui que lui, Pierre, avait choisi de suivre?
Lui, Pierre, a tout quitté pour suivre quelqu’un en qui il a vu le messie.
Et Jésus a confirmé que lui, Pierre, était alors inspiré par Dieu.
Et voilà qu’au bout du chemin il se trouve en face d’un condamné…
qui se laisse condamner.
Comment ce Jésus faible peut-il être le messie?
Au-delà de Jésus, c’est l’image même de Dieu qui est, pour Pierre, remise en question.
Dieu n’est-il pas le Tout-puissant qui libère?
Dieu n’est-il pas Celui qui nous délivre de nos ennemis, dont Il triomphe?
Dieu n’est-il pas le Juste Juge qui punit les impies, les malfaisants?
Dieu n’est-il pas Celui qui soutient le juste contre ceux qui l’oppriment?
C’est tout l’univers religieux de Pierre qui se trouve ainsi remis en cause.
Que fait-Il le Dieu d’Israël, le Dieu tout-puissant et juste,
en laissant ainsi Jésus sans secours? en abandonnant son messie?
Le doute est entré dans le coeur de Pierre.
Ne s’est-il pas trompé? Cet homme est-il vraiment choisi par Dieu?
Ce qui arrive à Pierre n’est-il pas d’ailleurs ce qui peut arriver
à tous ceux qui s’engagent à la suite de Jésus?
Un jour ou l’autre nous rencontrons de l’opposition et des critiques.
Nous pensions pouvoir réussir. Ce besoin de réussir est tellement ancré en nous.
Mais il nous faut regarder Jésus: il a abouti sur la croix!
Il est humain que cela soit difficile à accepter.
Dans son doute, Pierre n’est peut-être pas loin de ceux qui approuvent la mort de Jésus.
Les raisons de la mort de Jésus
Les 4 récits évangéliques donnent comme ultime raison de la condamnation:
cet homme s’est dit le messie!
Cette affirmation devrait provoquer l’intervention de Rome
qui ne peut supporter d’autre chef, en Israël, que ceux que l’empereur nomme.
Plutôt que voir Rome réprimer dans le sang un regroupement autour de Jésus-messie,
les chefs juifs pensent qu’il vaut mieux qu’un seul meurt.
De plus, les Romains ayant enlevé aux chefs juifs le pouvoir de condamner à mort,
en accusant Jésus de se dire messie, ils donnent au romain Pilate un bon argument.
Mais la décision des chefs juifs avait sans doute un autre motif:
ce qu’ils reprochent à Jésus, ce n’est pas de se dire le messie,
mais c’est plutôt d’avoir un comportement, un enseignement
qu’ils ne reconnaissent pas comme celui du messie?
On reproche à Jésus de porter atteinte à la Tora, à l’enseignement sacré:
parce qu’il mange chez des publicains,
qui sont des voleurs et des collaborateurs avec l’ennemi (cf. Mt 11,19):
Voici un glouton et un ivrogne, un ami des collecteurs d’impôts et des pécheurs.
C’est chez un pécheur qu’il est allé loger (Lc 19,7);
parce qu’il ne fait pas les ablutions avant le repas (cf. Lc 11,38):
Manger sans s’être lavé les mains ne rend pas l’homme impur (Mt 15,20).
C’est du coeur que viennent les mauvaises intentions qui rendent impur (Mt 15,19);
parce qu’il fait des guérisons le jour du sabbat qui est un jour de repos:
Cet individu n’observe pas le sabbat: il n’est donc pas de Dieu (Jn 9,16);
parce qu’il se laisse caresser par une prostituée et se sert de l’amour de cette femme
pour faire la leçon à un Juif très croyant, un Pharisien:
Ses nombreux péchés ont été pardonnés
puisqu’elle montre beaucoup d’amour (Lc 7,47);
parce qu’il ne condamne pas la femme adultère
et couvre de honte les Juifs qui veulent la lapider conformément à la Tora:
Moi non plus je ne te condamne pas. Va et désormais ne pèche plus (Jn 12,11);
parce qu’il ose dire à un paralytique: Tes fautes sont pardonnées.
Cet homme blasphème! Qui peut pardonner les péchés, sinon Dieu seul? (Lc 5,21);
parce qu’il refuse de condamner les Romains
et qu’il demande plutôt aux Juifs de faire leur propre examen de conscience;
parce qu’il fait l’éloge de ceux qui se reconnaissent pécheurs
et condamne ceux qui se croient parfaits parce qu’ils sont pieux:
Qui s’élève sera abaissé. Qui s’abaisse sera élevé (Lc 18,14).
Ce procès de Jésus n’a-t il pas été fait dès les débuts de sa prédication?
En effet, ses paroles et ses attitudes ont dérouté
car elles ne s’accordaient pas avec la Tradition.
Elles ont scandalisé parce qu’elles ne correspondaient pas à la façon
dont beaucoup comprenaient la Tora.
Le chemin que Jésus propose pour aller à Dieu est tellement différent
de celui que proposent les penseurs officiels d’Israël.
Ceux-ci ne pouvaient donc pas voir Jésus comme un vrai messie.
Jésus prêche trop l’amour et le pardon au détriment de la justice.
Il prêche trop la non-violence qui leur semble inefficace contre les malfaisants,
et notamment contre les Romains.
Il prêche trop la liberté de conscience.
Il apprend aux gens que la vérité de ce que l’on est, de ce que l’on fait,
passe avant l’obéissance aux règles, aux rites, à la discipline.
Il prêche trop la liberté au détriment de l’obéissance.
Pour lui, l’obéissance n’est pas la soumission à un ordre qui viendrait d’ailleurs,
même si cet ailleurs est Dieu.
Obéir, c’est accorder sa conduite à la volonté de Dieu qui nous veut libres.
Dieu est libérateur. Dieu nous veut aimants, c’est-à-dire libres.
Il n’y a pas d’êtres aimants sans liberté. Et pas d’êtres libres sans amour.
Ce Jésus -qui agit comme un être libre à l’égard de tous et de tout-
déplaît à ceux qui gouvernent et font respecter les lois.
Cet homme -qui agit avec bonté et compassion-
déplaît à ceux qui défendent la justice.
Cet homme -qui agit humblement, sans violence-
déplaît à ceux qui veulent employer la force contre les Romains pour libérer Israël.
Dans la cour, où il voit son Maître abandonné et outragé,
Pierre se sent peut-être proche de tous ceux qui n’ont pas compris Jésus
et se sont scandalisés de ses paroles et de ses gestes.
Pierre n’a pas encore accepté que Jésus préfère la bonté à la justice,
le pardon au châtiment des coupables, le don de lui-même à la légitime défense.
Pierre se sent peut-être proche de tous ceux qui accusent Jésus
parce qu’il prêche un Dieu qui n’est pas celui dans lequel ils croient.
Christian Duquoc traduit bien ce qui a conduit Jésus à la croix:
Certes, «tout en lui avait l’allure du prophète: la parole, l’attitude, le miracle même,
et pourtant tout en lui sapait l’organisation séculaire de la religion
et faisait éclater l’image alors majoritaire de Dieu. …
Le chemin qui menait l’homme à Dieu selon Jésus
était si différent à leurs yeux de la voie biblique
qu’il leur parut impensable que cet homme ne fut pas un faux messie»
(Christian Duquoc, Assemblées du Seigneur 19, p. 69-70).
Pour Pierre, comme pour les Pharisiens et les Zélotes,
le Dieu libre, bon et humble -qui est le Dieu que Jésus appelle si facilement Papa-,
ce Dieu leur semblait une caricature du vrai Dieu.
Mais Jésus, lui, connaît Pierre.
Et il saura amener Pierre à reconnaître en lui le vrai visage de Dieu.
L’Évangile nous dit simplement: Le coq chanta. Et Pierre se souvint.
Il se souvint de quoi? Du geste de Jésus lui lavant les pieds.
Ce geste n’était pas tant un geste d’humilité qu’un geste d’amour:
en effet, laver les pieds était considéré comme trop humiliant
pour qu’on puisse le demander même à un serviteur;
mais c’était un geste d’affection qu’une fille pouvait accomplir
envers son père et un disciple envers son maître.
On disait qu’un maître, qui refusait à son disciple qu’il lui lave les pieds,
refusait l’amitié de son disciple.
À Pierre, qui refusait qu’il lui lave les pieds, Jésus va dire:
Si je ne te lave pas les pieds, tu ne seras pas en communion avec moi (Jn 13,8).
Et Jésus avait fait ce geste alors même qu’il savait que Pierre allait le renier.
Pierre se souvient…
Maintenant, il comprend que -d’avance- Jésus lui a pardonné.
Le récit de Luc nous dit:
Comme Pierre parlait encore, un coq chanta.
Jésus, se retournant, posa son regard sur Pierre.
Et Pierre se souvint de la parole du Seigneur (Lc 22,60-61).
Ce regard est le même que celui qu’avait Jésus lors du lavement des pieds.
Alors, Pierre va expérimenter en son propre coeur,
que le pardon est plus fort que la condamnation,
que la bonté est plus forte que la punition.
Pierre comprend que ce visage d’humilité de Jésus est le vrai visage de Dieu,
du Dieu qui est Père.
Dans sa marche vers la mort, Jésus remet en question notre regard sur Dieu.
Inévitablement nous concevons Dieu à notre mesure.
Nous pensons toujours -un peu (!)-
que Dieu exige de nous des performances morales,
que Dieu a des reproches à nous faire
si nous ne sommes pas à la hauteur de ses attentes.
Nous avons bien du mal à regarder Dieu
comme ce Père qui va au-devant de ses fils,
comme ce Père qui pardonne,
comme ce Père qui se réjouit de notre retour,
comme Celui qui se met à nous servir, à nous nourrir,
comme Celui qui donne sa vie comme geste ultime de pardon,
comme Celui qui ne désire rien d’autre de nous
qu’une grande communion dans l’amour.
Pierre comprend qu’il lui faut changer de regard sur Dieu.
Et qu’il lui faut changer de regard sur la croix:
car cette croix qu’il voulait éloigner de Jésus,
cette croix qui était pour lui un scandale,
cette croix est justement ce qui vient de le sauver, lui, Pierre,
en lui révélant que le véritable amour est pardon.
Il sait maintenant que, malgré ses doutes et toutes ses faiblesses,
Jésus continue et continuera à lui accorder son amitié. À jamais!
Georges Convert
—
Mon grain de sel,
par Mario Bard.
Être normal ou ne pas l’être, telle est la question
C’est bizarre que la campagne électorale québécoise se termine alors que la période de Pâques commence. À cette occasion, plusieurs politiciens et aspirants députés jouent les sauveurs. Sont-ils assis sur des ânons, petit de l’ânesse, cherchant ainsi la paix et le service de l’autre? Je ne sais pas.
Une chose est sûre : la plupart finiront leur jour dans un lit, entouré de leurs proches. Ou bien partants paisiblement pour le ciel, en plein milieu de leur sommeil. Ce n’est pas le cas de celui que nombre d’êtres humains sur la planète considèrent comme leur sauveur. Mourir, cloué sur une croix, en plus d’être trahi par au moins 20 % de ses disciples – sans compter ceux et celles qui n’ont rien dit, mais n’en ont pas moins pensé – c’est beaucoup en 24 heures!
Ieshoua n’est pas naïf. Il connaît les cœurs, les caractères, les peurs qui habitent l’être humain. L’une de ces peurs est bien sûr de ne pas être inclus dans le groupe. Nous pouvons l’observer par nos propres comportements. Dans une foule, nous faisons ce que les autres font. Si l’un des congénères moutonniers tombe, gare à lui! La foule lui marchera dessus.
Oh Désespoir! Pourquoi devenons-nous aussi peu coopératifs quand vient le temps de « paraître » en public? Nous devons peut-être donner le choix à l’être « d’être ». Nos âmes sont si différentes de la norme, devenue véritable religion dans la société du bien-pensant et du bête-agir. Nous penchons si souvent vers le plus facile. Suivre, sans discuter et sans penser.
Cette foule du Dimanche des rameaux, où est-elle quand Ieshoua est arrêté? Elle l’avait fait roi! Absente, elle renie comme Pierre. Elle l’oublie, parce qu’il est dangereux en ces heures sombres de prêter une quelconque crédibilité à celui qui a tout de même relevé de la mort Lazare. Triste moment pour Ieshoua.
Tragique même au sens de la tragédie grecque. Pour aller au bout du message, il doit mourir sur une croix, complètement abandonné de la plupart de ceux qui l’avaient suivi. Notre lâcheté moutonnière a eu le dernier mot.
Au quotidien, quelles sont mes lâchetés moutonnières? Pourquoi ne pas oser dénoncer l’injustice quand elle se présente à moi? Je n’y arrive pas. L’injustice d’une dame devant qui l’on passe à la caisse chez le marchand. Je lève les yeux au ciel, mais n’ose dire un mot… Je laisse pourrir la possibilité d’illuminer un peu la journée de quelqu’un.
Parce que c’est trop risqué. Je ne veux pas me faire rabrouer. Les gens vous regardent avec curiosité. « Quoi, il a osé? » C’est vrai que c’est dangereux de s’avancer. Par contre, le seul changement possible, qui commence par ces petits gestes au magasin, devient possible lorsque chacun d’entre nous se sent concerné et désire aider.
Oui, cela est parfois douloureux. Oui, il y a parfois des regards durs. Oui, la norme est difficile à transgresser. Mais, si Ieshoua avait décidé de déclamer des propos normaux au sujet de Dieu-Père, jamais il n’aurait osé dire et répéter que le pardon et l’amour sont les deux seuls ingrédients de base d’une vie réussie.
Chrétiens, l’avons-nous saisi au creux de notre cœur et de notre quotidien? Sommes-nous normaux ou de plus en plus chrétiens? Belle Semaine Sainte!
Mario Bard
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