Évangile du 18e dimanche du temps ordinaire (année C), selon le récit de Luc (12, 13-21)
13 Quelqu’un, parmi la foule, dit à Jésus:
Maître, dis à mon frère de partager l’héritage avec moi.
14 Il lui dit:
l’homme! Qui m’a établi sur vous comme juge ou pour faire vos partages?
15 Il leur dit: Voyez! Gardez-vous de toute avidité:
parce que ce n’est pas dans le fait d’être dans l’abondance
que la vie de quelqu’un vient de ses biens.
16 Il leur dit une parabole:
Le domaine d’un homme riche a bien rapporté.
17 Il se fait en lui-même cette réflexion:
«Que faire? Je n’ai pas où rassembler mes récoltes.»
18 Il dit: «Voilà ce que je ferai:
J’abattrai mes granges et j’en construirai de plus grandes.
J’y rassemblerai tout mon blé et mes biens.
19 Et je dirai à mon âme:
mon âme: tu as beaucoup de biens entreposés pour beaucoup d’années.
Repose-toi, mange, bois, fais bombance.»
20 Et Dieu lui dit:
«Insensé! cette nuit même on te redemandera ton âme:
ce que tu as préparé, pour qui ce sera?»
21 Ainsi de celui qui thésaurise pour lui-même
et qui ne s’enrichit pas en Dieu.
Le commentaire du pain sur la table,
par Georges Convert.
Voilà un petit récit qui ressemble à une leçon de morale comme en donnent les fables de Lafontaine.
Mais n’y a-t-il pas une différence qui fait de ce texte un Évangile, une annonce divine?
Nous sommes dans la grande section du récit de Luc qui décrit la montée
de Jésus et de ses disciples vers Jérusalem.
Luc y a rassemblé une grand part de l’enseignement de Jésus à ses disciples.
Donnons quelques exemples: l’amour du prochain avec la parabole du bon Samaritain (Lc 10,25ss);
l’amour de Dieu avec l’épisode de Marthe et de Marie (Lc 10,38ss);
la prière avec le Notre Père (Lc 11,1ss); enfin l’attitude face aux biens matériels (Lc 12,13-34),
qui est introduite par une demande d’un auditeur sur une question d’héritage.
Maître, dis à mon frère de partager notre héritage.
Il s’agit probablement de frères dont le père est décédé.
D’après la législation israélite (Dt 21,17), seuls les garçons peuvent hériter.
Les filles n’héritent que s’il n’y a pas de fils (Nb 27,8-10).
Dans le cas d’un partage,
l’aîné aura droit à une double part des biens mobiliers (meubles, argent, etc)
et il aura la propriété et l’usage de tous les biens immobiliers (terres et maisons).
Cela permet de ne pas démembrer les terres et aussi de faire de cet aîné le nouveau chef de famille.
Souvenons-nous de la parabole des deux fils
où le père réponds aux récriminations du fils aîné:
Mon fils, tout ce qui est à moi est à toi (Lc 15,31).
Dans notre récit, l’aîné voudrait sans doute garder tout l’héritage en indivision,
ce que la coutume permet.
Ici, le ou les autres frères voudraient avoir leur part immédiatement
afin de pouvoir en faire ce que bon leur semble.
Dans ces circonstances, il semble que les rabbins donnaient volontiers leur arbitrage.
Mais le rabbin Jésus ne veut pas être considéré comme un juge ou un arbitre.
Sans doute parce qu’il veut renvoyer chacun à sa propre responsabilité.
Pour Jésus, son rôle est de donner les grandes orientations que la vie doit prendre
si l’on veut l’orienter vers le bonheur durable, celui qui demeure au-delà de la mort:
Je suis venu pour que les hommes aient la vie
et qu’ils l’aient en abondance (Jn 10,10).
Gardez-vous de toute avidité
Comment garantir à notre propre existence cette vie en abondance?
Jésus avertit d’emblée que la richesse ne peut garantir cette vie véritable:
ce n’est pas dans le fait d’être dans l’abondance que la vie de quelqu’un est assurée.
Les biens matériels ne donnent aucune garantie d’une vie par delà la mort.
Jésus répond par une sorte de récit exemplaire.
Il décrit la réflexion d’un homme qui a de nombreux biens et qui s’organise
pour en jouir le mieux et le plus longtemps possible.
Dieu entre alors en scène pour annoncer la mort imminente de ce riche.
L’imminence de la mort est sans doute destinée à renforcer la leçon morale,
mais celle-ci reste valable pour toute lvie humaine, quelqu’elle soit.
Le mot grec traduit par avidité signifie littéralement: le fait d’avoir en plus.
Cet « avoir plus » est souligné par la répétition de l’adverbe « beaucoup »:
mon âme: tu as beaucoup de biens entreposés pour beaucoup d’années.
Cet « avoir plus » est très égoïste.
Le texte foisonne de pronoms possessifs: mes récoltes, mes granges, mon blé…
Le dialogue de cet homme est un dialogue avec son « moi ».
Le mot grec est « âme » mais il traduit un mot araméen qui veut dire l’être, le moi profond.
On pourrait traduire: Je dirai à mon « moi »: ô mon moi…
Cet homme ne parle qu’à lui-même et de lui-même.
D’ailleurs personne d’autre n’interviendra dans la réflexion, sauf Dieu.
Enfin le but de tous ces biens est encore entièrement tourné vers le moi:
Repose-toi, mange, bois, fais bombance.
Ce que tu as préparé, pour qui ce sera?
Tout a été effectivement préparé pour soi. Rien n’est prévu pour les autres.
Ceux-ci n’ont aucune place dans la vie de ce riche.
Pas même pour partager ses repas de fête et son plaisir.
Le riche se préoccupe uniquement de lui-même:
il est seul. Ses biens ne servent qu’à lui, et à lui seul.
Et comme on n’emporte pas l’argent dans la mort, il se retrouve seul dans l’au-delà.
Comme dit le proverbe: «le coffre-fort ne suit pas le corbillard.»
La conclusion de l’exemple aurait pu être cette leçon déjà donnée par Jésus:
Que sert à l’être humain de gagner l’univers, s’il se perd ou se dépouille? (Lc 9,25).
Ou encore ce psaume que Jésus a dû souvent prier à la synagogue:
Ils mettent leur confiance dans leur fortune et se vantent de leurs grandes richesses.
Le droit de vivre ne s’achète pas: on ne peut payer à Dieu la rançon de sa vie.
Pour prolonger sa vie à l’infini, le prix à payer serait trop lourd.
Peut-on vivre indéfiniment sans jamais voir la fosse?
Ne voit-on pas les sages mourir?
Ils périssent comme le fou et l’insensé. Ils laissent leur fortune à d’autres.
Ils croyaient leur maison éternelle, et leur demeure établie pour les siècles:
ils avaient donné leur nom à des terres! L’homme riche et puissant ne dure pas:
il est comme la bête engraissée qu’on abat.
C’est là le destin de ceux qui ont une folle confiance en eux.
C’est l’avenir de ceux qui se plaisent à leurs beaux discours.
Ils vont grossir le troupeau que la mort mène paître.
Ne crains plus quand un homme s’enrichit et quand la gloire de sa maison grandit.
Il n’emporte rien dans la mort et sa fortune ne le suivra pas (Ps 48,7-18).
Que faire?
La question «Que faire» est sans doute très valable ici.
La première prise de conscience est peut-être celle de la propriété toute relative des biens.
Les biens de ce monde ne nous appartiennent pas d’une manière exclusive.
Nous n’en sommes pas les propriétaires.
Même gagnés par le travail, il ne nous sont finalement que prêtés pour être bien gérés.
Toute richesse est le fruit, le produit du travail de la multitude humaine.
Personne ne fait rien fructifier sans le concours de nombreux autres.
Personne ne doit se considérer comme l’unique et absolu propriétaire de ses biens.
D’une certaine façon la terre appartient à toute l’humanité
et les fruits qu’elle produit sont le concours de nombreuses personnes.
Nous ne sommes que les locataires, les gérants des biens de ce monde.
Au IVe siècle, Basile de Césarée le disait très clairement aux fidèles de son diocèse:
«Les biens présents, d’où te sont-ils venus? Si tu dis: du hasard, tu es un athée
car tu ne reconnais pas le Créateur et tu ne sais pas gré à Celui qui t’a pourvu.
Si tu confesses qu’ils viennent de Dieu, dis-nous la raison pour laquelle tu les as reçus?
Est-ce que Dieu serait injuste, lui qui nous partage inégalement les biens nécessaires à la vie?
Pourquoi es-tu riche et celui-là est pauvre?
Toi qui enveloppes tous tes biens dans les plis d’une insatiable avarice,
tu penses ne faire tort à personne en dépouillant tant de malheureux?
Tu n’es pas un spoliateur, toi qui, de biens dont tu as reçu la gestion, fais ton bien propre?
À l’affamé appartient le pain que tu mets en réserve.
Ainsi tu commets autant d’injustices qu’il y a de gens à qui tu pourrais donner»
(Homélie selon Luc 7).
Nous sommes gérants des biens de ce monde. Et cela inclut une responsabilité.
Non seulement nous devons être de bons gérants qui ne dilapident les biens,
mais aussi nous devons les gérer en partageant une bonne part des fruits avec les plus démunis.
Les plus démunis n’ont pas eu les ressources que nous avons eues.
La vie ne donne pas des chances égales à tous: au plan de la santé, de l’intelligence;
au plan de l’héritage: celui qui nous vient de la famille ou du pays dans lequel on naît.
Ces chances induisent donc des responsabilités.
De nombreux passages de l’Évangile nous indiquent ce qu’il faut faire de nos biens:
Vendez vos biens et donnez-les en aumônes (Lc 12,33).
À l’homme riche qui lui demande quoi faire pour vivre de vie divine, Jésus dira:
Tout ce que tu as, vends-le et distribue-le aux pauvres (Lc 18,22).
Le partage avec les démunis est donc la première façon de collaborer à plus de justice.
Voilà quelle est la responsabilité des plus riches.
Considérer les biens dont on dispose comme notre absolue et unique propriété,
c’est donc exclure les autres de l’horizon de notre vie.
C’est bâtir son existence dans l’isolement.
Et c’est finalement être sans amis.
Le partage au contraire crée le plus souvent des relations d’amitié.
C’est une des leçons de l’épisode du gérant malhonnête.
Ce gérant qui a perdu sa place, parce qu’il a mal administré les biens de son patron,
s’arrange pour se faire des amis, en réduisant les redevances des créanciers.
Remarquons qu’il n’est pas sûr que ce geste soit une escroquerie:
il appartenait en effet au gérant de fixer les redevances des fermiers.
Peut-être le gérant les avait-il largement majorées (là serait alors sa malhonnêteté?)
pour que le pourcentage de la redevance qui lui revenait en propre soit plus grand.
De toute manière, la conclusion de l’épisode est celle-ci:
Et le maître loua cet intendant malhonnête d’avoir agi de manière avisée.
Car les fils de ce monde sont plus avisés que les fils de lumière.
Faites-vous des amis avec l’argent
afin que ceux-ci vous accueillent dans les tentes éternelles (Lc 16,8-9).
Ainsi de celui qui thésaurise pour lui-même et qui ne s’enrichit pas en Dieu
Notre texte parle aussi de s’enrichir en Dieu:
D’autres passages évangéliques comportent aussi cette perspective:
Faites-vous des bourses qui ne s’usent pas,
un trésor inépuisable dans les cieux (Lc 12,33).
Tu auras un trésor dans les cieux (Lc 18,22).
Les cieux désignent ici la vie avec Dieu.
Que comprendre de ce trésor dans les cieux, de ce trésor dans la vie avec Dieu?
Est-ce Dieu qui récompense celui qui distribue ses biens aux pauvres?
Ou n’est-ce pas plutôt que l’amitié -qui sera tissée par le partage entre favorisés et démunis-
demeurera dans l’éternité?
Celui qui a vécu en se faisant des amis, les retrouve dans l’au-delà.
Ceux-là l’accueilleront dans les tentes éternelles…
C’est saint Basile qui disait que les pauvres sont « des greniers suffisants »
et qu’en partageant on s’enrichit des amitiés qui naissent du partage.
Mais il faut ajouter que ces amitiés sont d’autant plus vraies chez les pauvres.
Partager avec ceux qui peuvent partager en retour,
c’est risquer de construire des amitiés fragiles, nées de l’intérêt réciproque.
Partager avec ceux qui ne peuvent rien nous rendre, c’est bâtir une relation sur la gratuité.
Et ce qui se construit ainsi sur la gratuité a une grande force de fidélité et de pérennité.
Cette amitié gratuite est un trésor que nul voleur ne peut prendre,
qu’aucune mite ne peut détruire (Lc 12,33).
Un proverbe biblique semble bien décrire cela: «Qui donne au pauvre prête à Dieu» (Pr 19,17).
Que veut-il dire? Au pauvre, on ne peut que donner.
On ne peut pas prêter.
Et seul celui qui vit de vraie gratuité peut recevoir de Dieu.
Car Dieu ne prête jamais en échange de quelque chose.
Il ne donne que gratuitement… à celui qui sait recevoir gratuitement.
Le « sermon sur la montagne » explicite cela.
Ainsi il est dit en Matthieu:
Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle récompense aurez-vous? (Mt 5,46).
Ce que Luc traduit ainsi (Lc 6,32.34):
Si vous aimez ceux qui vous aiment, quelle gratitude sera pour vous?
Si vous prêtez à ceux dont vous espérez recevoir, quelle gratitude pour vous?
En Dieu, il ne peut y avoir de salaire qui soit donné en retour du bien fait à quelqu’un.
Un « retour » est de l’ordre de l’équité, de l’ordre de la justice dans les relations.
Cela ne joue plus dans les relations d’amour où la gratuité est absolue,
où elle est nécessaire pour qu’il y ait vraie amitié.
L’amitié ne se nourrit pas de la stricte justice mais du don et de la générosité.
Une amitié basée sur le donnant-donnant est une amitié en péril, en survie.
Prêter à Dieu, c’est vivre la gratuité.
Dieu certes manifestera toujours sa bonté,
mais ce ne sera jamais par un « retour » qui serait une équivalence.
Attendre de Dieu une récompense, c’est vouloir vivre une relation de stricte justice
avec Celui qui n’est qu’Amour et Bonté.
Dieu ne peut pas nous récompenser (donner en retour de quelque chose) sans se renier lui-même.
À ce proverbe «Qui donne aux pauvres prête à Dieu»,
une grand-maman québécoise connaissait une suite qui me semble tout à fait évangélique:
«Et c’est la vie qui le lui rend.»
C’est toute la vie qui est un don de Dieu.
C’est au long de toute notre vie, dans la pure gratuité, que Dieu nous fait grâce, gratitude.
Ce proverbe se retrouve dans une homélie de Basile de Césarée qui traite du prêt à intérêt:
«Quel est donc l’ordre du Seigneur?
Prêtez sans rien espérer en retour.
Comprends la force de cette parole et tu admireras la bonté du Législateur.
En effet, Celui qui a compassion du pauvre prête à Dieu.
Le maître de toutes choses ne mérite-t-il pas d’être accepté comme garant de cet argent?
Et tu refuseras Dieu comme caution du pauvre!
Fais confiance au Seigneur: il te paiera largement l’intérêt des pauvres.
Attends avec confiance les preuves de bonté de la Bonté même» (homélie sur le Ps 14).
Insensé!
Ailleurs, l’Évangile nous rapporte cette tristesse de Jésus:
Malheureux, vous les riches: vous avez votre consolation (Lc 6,24).
Ce n’est pas la richesse elle-même qui est condamnable.
Mais c’est de chercher le bonheur dans les biens au lieu de le chercher dans les relations humaines.
Seules les relations basées sur la gratuité peuvent apporter un bonheur durable.
Voilà la raison de la recommandation fréquente de Jésus:
Ne vous inquiétez pas de ce que vous mangerez…
Cherchez le règne de Dieu. Tout le reste est donné en plus (Lc 12,22.31).
Chercher le règne de Dieu, c’est miser toute l’existence
sur la relation avec Dieu comme avec le Père.
C’est aussi miser son existence sur les relations aux autres comme avec d’autres fils et filles du Père.
C’est donc tout miser sur la gratuité de l’amour.
Notre société ne s’éloigne-t-elle pas le plus souvent de cette orientation?
Tout n’est-il pas programmé pour faire des profits?
Ne sommes-nous pas endoctrinés par la publicité,
conditionnés à voir le bonheur de notre vie dans la consommation,
sinon dans l’accumulation des biens matériels?
Jacques Godbout parle d’une société qui doit retrouver l’esprit du don si elle veut survivre.
Lui aussi, dans son livre L’esprit du don, associe le don au lien de relation:
«Qualifions de don toute prestation -de bien ou de service- effectuée sans garantie de retour
en vue de créer, nourrir ou recréer le lien social entre les personnes» (Boréal, p. 32).
Et Pierre Després commente ainsi le livre:
«Dans un monde où nos relations à l’univers et à autrui sont devenues parfaitement fonctionnelles,
il devient urgent de redonner à l’esprit du don la place essentielle
qu’il a toujours occupée dans les sociétés humaines.
Un tel esprit ne pourrait que contribuer
à désamorcer la division et la violence de nos sociétés modernes.»
Jean-Paul II nous a invité à fêter le jubilé de l’an 2000 en travaillant à convaincre
les gouvernements occidentaux d’annuler la dette des pays du Tiers-monde.
« Célébrer le jubilé-Renouveler le monde » était une initiative canadienne oecuménique
qui comprenait des organisations religieuses, environnementales, syndicales, féminines
et de promotion de la justice.
Elle proposait à nos signatures le texte suivant:
«Nous, les soussignés, estimons qu’il y a lieu de marquer le tournant d’un nouveau millénaire
en donnant de l’espoir aux populations démunies de notre planète.
Pour assurer un nouveau départ, nous croyons que le moment est venu
d’éliminer les dettes accumulées dont le poids accable les pays les plus pauvres
et qui ne peuvent être remboursées.
Nous demandons aux dirigeants des pays créditeurs de renoncer à ces dettes.
Nous demandons également à ces dirigeants de prendre des mesures
pour que l’endettement ne puisse plus jamais atteindre de tels niveaux.
À cette fin, ils doivent promouvoir le développement durable sur le plan économique et social,
au lieu de favoriser les mesures, imposées par les institutions financières internationales,
qui ont pour effet d’appauvrir encore davantage les populations les plus démunies de la terre
par la destruction de l’environnement et des systèmes de santé et d’éducation.»
Le Jubilé est passé. Certains pays ont répondu en partie à cet appel.
Mais la pauvreté des pays en voie de développement continue.
Il ne faut pas nous démobiliser.
Suis-je prêt à faire ma part pour donner aux pays pauvres?
Et en premier lieu, pour payer le juste prix des produits que nous importons de ces pays:
bananes, café, riz… entre autres.
Car le prix de ces produits est le plus souvent fixé par les pays riches qui les importent
et qui ne tiennent pas compte du juste prix à payer à ceux qui produisent.
On ne peut vouloir annuler la dette des pays pauvres sans en consentir le prix à payer pour nous,
sans ressentir concrêtement le prix de la solidarité et du partage.
Cela demande une conversion intérieure de chacun.
Suis-je conscient que je ne suis qu’un gérant des biens de la terre… jamais un propriétaire exclusif?
Suis-je de ceux qui thésaurisent pour eux-mêmes
ou de ceux qui s’enrichissent en ce qui concerne Dieu?
Suis-je un fils de lumière avisé?
Ou suis-je un insensé, c’est-à-dire quelqu’un qui n’a pas misé sur la gratuité, à la manière de Dieu?
«Cette attitude est [dite] insensée parce qu’elle entraîne l’humanité à la catastrophe,
à la fois celle des pays pauvres de plus en plus affamés
et celle des pays riches de plus en plus gavés de publicité et de consommation.
Elle est insensée parce qu’il est impossible de vivre avec Dieu
dans un tel contexte d’égoïsme et d’aliénation»
(Assemblées du Seigneur, t.V, p. 296).
La leçon donnée par Jésus est peut-être une morale à la manière des fables de Lafontaine…
mais elle nous a d’abord transportés au plan de notre relation à Dieu
(le Dieu de la gratuité et de l’amour)
pour qu’ensuite nous transposions cette lumière au plan de nos relations humaines.
N’est-ce pas toujours dans notre relation au prochain
que se vérifie la vraie nature de notre lien à Dieu?
Si quelqu’un jouissant du monde voit son frère dans la nécessité
et lui ferme ses entrailles,
comment l’amour de Dieu demeurerait-il en lui? (1Jn 3,17).
Si quelqu’un dit: «J’aime Dieu» et qu’il déteste son frère, c’est un menteur:
celui qui n’aime pas son frère qu’il voit ne saurait aimer Dieu qu’il ne voit pas (1Jn 4,20).
Jésus, je suis trop souvent tiraillé en mon coeur
entre égoïsme et gratuité.
Les mains tendues vers mon seul bonheur.
Libère-moi des sentiers où je ne peux donner.
Souffle en moi, Seigneur, ton esprit de don et de bonté.
Mets en moi le chemin de la gratuité.
Fidélise-moi dans l’écoute contemplative et active de ta parole.
Que je devienne conscient au quotidien
que rien ne m’appartient, que tout m’est prêté pour être partagé.
Soutiens-moi de ton amitié pour que j’entretienne avec les autres
les relations d’amour qui me mèneront jusqu’à l’éternité. Amen!
Georges Convert
»»» Questions
1. Pourquoi Jésus refuse-t-il de donner une ligne de conduite à l’homme
qui lui demande quoi faire avec son frère et l’héritage?
2. Comment le riche de la parabole voit-il le moyen de s’assurer d’une vie heureuse?
3. Selon Jésus, qu’est-ce qui peut garantir à notre existence une vie en abondance?
4. Pourquoi l’avidité des biens matériels ne peut-elle conduire au bonheur véritable?
5. Pourquoi doit-on se considérer comme des gérants des biens de ce monde?
6. Que signifie « s’enrichir en Dieu »?
7. Quels sont les gestes concrets que je peux accomplir dans mon quotidien
pour arriver à une plus grande gratuité avec Dieu et mon prochain?
8. Pourquoi sommes-nous souvent portés à une autosuffisance
et à une recherche égoïste dans notre existence?
9. Quels sont les gestes de solidarité avec les pays en voie de développement
que je peux poser de manière concrète?
10. Dans ma vie personnelle, puis-je nommer les relations qui me semblent gratuites et celles qui souffrent d’un manque de gratuité?
11. Comment je vis ma relation avec Dieu? Est-elle marquée par la gratuité?
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