Mon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 13 décembre 2015
par Mario Bard.
Une année pour la justice
« Ouvrez la porte de Justice! » a crié le pape François lors de la cérémonie d’ouverture de la Porte Sainte, qui marque le début de l’Année de la Miséricorde. Qu’est-ce que Dieu désire pour moi en cette année de grâce? Quel sens donner à cette miséricorde?
D’abord, l’Évangile d’aujourd’hui éclaire beaucoup le sens de ce que les premiers évangélistes, inspirés de l’Esprit Saint, ont considéré comme essentiel dans l’annonce de cet Évangile qui les a touchés jusqu’à la moelle des os. Ils espèrent que la justice soit d’abord servie, soit le fruit de la conversion.
Peut-être trop souvent comme chrétiens de pays riches et possédant une histoire de chrétienté, nous avons tendance à réserver notre conversion à des questions de morale! Une morale irréprochable à atteindre en matière sexuelle; une façon de se penser épurée de toutes tentations.
Pourtant, Jean ne mentionne jamais le mot moral. Il parle plutôt d’action très concrète qui concerne la vie de tous les jours et qui sont des actes pour réparer la justice. Dieu n’est-il alors qu’un justicier sans morale?
Non; mais j’ai la forte impression que le chemin du service de la justice est celui qui mène à un homme ou une femme devenus moralement meilleurs. D’ailleurs, à quoi sert de jouer la pureté morale si mon frère, ma sœur, est aux prises avec de graves problèmes de faim, de soif, de logement, pris dans le tourbillon de ceux qui veulent transformer ce monde en centre d’achat pour requins affamés d’injustice, manière Donald Trump, idolâtres d’argent?
Je l’ai déjà dit : la conversion n’est pas d’abord affaire de pureté morale. Elle est plutôt un retournement vers les actions qui mènent à la justice. À partir de là, mon cœur se transforme et devient moins intéressé par les tentations de ce monde. Et même quand, dans un effet de balancier, elles se révèlent fortes en nos cœurs et nous font succomber, j’ai espoir que le chemin de justice répare et éloigne de nous d’autres chemins qui s’avère illusion.
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Hier, je présentais la vidéo de l’ouverture de la Porte Sainte à un ami. Peu convaincu, il m’a ri au nez, déclarant : « Mais, la miséricorde? Pourquoi Dieu me crée-t-il pour ensuite me demander réparation? Ça n’a aucun sens. »
Je n’ai pas su quoi répondre. J’ai même été choqué. Puis, je me suis calmé. Pourquoi cette réaction? Connaissant bien cette personne, je sais que la religion catholique a joué le mauvais rôle dans sa vie. Une religion qui a d’abord été enseignée comme une série de codes de bonnes conduites à suivre, un code moral strict et sans queue ni tête qui, s’il n’est pas suivi, rend le « Bon Dieu » très méchant…
Un cœur, entraîné de la sorte à un très jeune âge, n’est plus en mesure de goûter la vraie nature de Dieu : l’Amour. Et, la révolte est souvent la seule réponse qui ait du sens. Et qui soit de santé comme on dit. Une révolte qui, je l’espère, se terminera un jour pour qu’apaiser, le cœur accueille la proposition d’un Dieu d’amour non pas comme une idée ridicule et sans but, mais plutôt comme un nouveau départ.
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De quoi sommes-nous en attente aujourd’hui? Avons-nous des attentes envers ce Dieu d’amour qui ne demande qu’à aimer? Ou bien sommes-nous pris dans les branches mortes de nos idées théoriques — empêtrés! — alors que mon frère, ma sœur, se meurt de faim, de soif et grelotte à la porte du métro pour se réchauffer?
Notre conversion à la miséricorde de Dieu, semble nous dire Jean le baptiste et l’évangéliste Luc, passe d’abord par des gestes de justice. Le premier geste est le plus difficile. Après, c’est comme l’exercice physique, la suite est comme du gâteau dans le palais de notre cœur : un bonheur, une joie. Et ce, malgré la souffrance inhérente et mystérieuse qui est dans toutes vies. C’est ce que je nous souhaite en cette Année de la miséricorde. Amen.
Mario Bard
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