Mon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 11 juin 2017
par Mario Bard.
Engendré, pour la Vie
Mon père a écrit juste avant de mourir : « Merci à la vie! » Dans ce texte court, il remerciait la beauté du monde et le fait d’avoir vécu tout ce qu’il avait vécu et toutes les opportunités que lui a simplement données le fait de vivre. Un hymne à la vie, très court, provenant d’un homme de la génération des silences, qui lisait beaucoup, mais n’écrivait presque jamais. Un homme qui voulait voir l’au-delà.
Étendu sur la croix, le Fils donne à sa vie un sens qui défie l’entendement. En peu de temps, il pardonne, invite au paradis, et remet sa mère à un autre homme. Il prend ensuite le temps de dire qu’il se sent abandonné, mais pour finalement remettre son Esprit au Père. Rien ne sent la vengeance. Nous sommes au bout d’une vie qui se donne. Peut-être pas comme Ieshoua – l’humain – l’aurait aimée. Après tout, qui veut mourir sur une croix, torturé comme un ennemi de l’État et livré par l’un de ses disciples? Franchement personne, pas même ces femmes et ces hommes religieux (au sens qu’ils font partie d’une religion) qui prétendent vouloir être martyr.
Le rapport entre les deux? Un amour de la vie qui rend caduques toutes les conquêtes que tentent les nouveaux dictateurs – Trump, Poutine, Erdogan, et j’en passe – d’un monde où devenir premier et possédé a toujours été une illusion dans laquelle sont tombés bon nombre de citoyens de la planète. Tout cela est caduc. Après tout, la planète est bien petite quand on regarde l’immensité infinie de l’univers! Nous vivons et mourons très rapidement quand on se compare à ces énormes masses de roc, de larves en fusion et de terres qui flottent partout, y compris notre belle planète bleue.
Devant tout cela, plusieurs attitudes sont possibles. Quelle est celle des gens qui se laissent engendrer par la Parole de Dieu, telle que proposée par Ieshoua de l’Évangile? Dans nos nuits intérieures, comment survivre? En griffant ce qui blesse, ou en essayant – patiemment et jusqu’à la mort par amour – de se laisser transformer pour ensuite partir nourrir et aimer le monde?
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Aimer la Vie. Vraiment? Selon certains, la 3e Guerre mondiale est commencée. Des bombes explosent dans les rues des capitales et de grandes villes, qu’elles soient situées au Moyen-Orient, en Afrique ou encore dans le monde occidental. L’Asie y échappe à peine. De nombreux dirigeants essaient d’augmenter leur pouvoir en mentant, en emprisonnant ou bien en guerroyant par terroristes interposés. Il y a aussi le dieu-économie; ils tuent d’une manière invisible par des coupes dans les programmes sociaux, par l’appétit d’employeurs assoiffés de profits qui coupent maintenant dans les os, ou encore, par les mensonges éhontés de lobbyings assoiffés d’influence… et éventuellement, d’argent. Dans ces conditions, comment continuer à aimer la vie? Peut-être… mais comment? Tout cela paraît complètement impossible.
Mon père aimait la Vie. Homme de silence, son désir était pourtant de se laisser transformer graduellement par un Amour plus grand que lui. Devenir enfin un avec cette Trinité qui ne peut qu’engendrer est urgent. Peu importe l’endroit où l’on a grandi, les épreuves traversées ou les personnes rencontrées. Des pauvres ont des sourires de millionnaires alors que de richissimes personnes sourient seulement quelques fois par année pour la caméra. C’est l’Esprit dans lequel nous baignons qui est tout. Ieshoua, remit au Père, a laissé pénétrer en Lui un Esprit : Saint.
La Trinité que l’on célèbre aujourd’hui veut à son tour nous aimer. Au point où plus aucune croix ne puisse tuer l’Amour de la Vie, engendrer dans l’Esprit de Ieshoua et dans la découverte de la beauté du monde – cette eau qui se mélange à la terre et devient glaise pour notre naissance –, pour qu’un amour advienne et construise en nous, enfin, cette phrase : « Merci à la Vie ».
Mario Bard
Étienne Godar
Merci Mario
Je suis souvent à la maison avec mon père, il ne peut plus rester seul. Le temps est parfois meublé d’un silence
qui ressemble au langage des signes. Il peut y avoir tout un déferlement de mots qui ne trouve jamais un son pour se dire, mais que la lumière du regard sait très bien faire vivre. Mon père est de la même génération que le tien, comme tu l’écris si justement, celle du silence. Il s’est arrêté de vivre suite à un AVC le 8 novembre. Il a toute sa tête et le langage. Il m’a fallu des semaines, des mois. Pour me mettre à la même vitesse que lui, pour apprendre à observer, saisir, croquer à la pomme quand elle bien est mure.
C’est parfois pénible de passer, dans la même semaine, d’une vitesse à l’autre. Cela occasionne, dans les détours, des dérapages dangereux. Mais, les semaines où j’arrive à arrimer les deux espaces temps, j’y puise , comme Jésus au puits de Jacob, une eau qui étanche une soif que je ne pensais même pas avoir. Yeux dans les yeux, nous vivons, dans des moments où on s’y attend le moins, des moments d’éternité.
Mario, tu m’en a fait vivre un cet après-midi