Mon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 3 juin 2018
par Mario Bard.
Oublier son confort pour trouver celui d’un cœur réjoui
L’expression « Corps et âmes » reprend l’idée : pour vivre complètement, il faut apprendre à se donner sans mesure, au complet, sans retour en arrière. Ce qui n’est évidemment pas très simple.
L’ambiance générale nous dit plutôt le contraire : écoute ton cœur et ton corps et limite-toi à ce qu’il est capable de faire, à ce que tu es capable de faire. Certes, c’est une sagesse qui doit être écoutée, qui est à prendre en considération et qui n’est pas négligeable. Pourtant, il dit bien peu de ce que les inventeurs, les sportifs, les artistes de toutes disciplines, expérimentent bien souvent : le goût de se donner et de dépasser ses propres limites. Le dépassement est un élément important des découvertes et des explorations qui aident à mieux comprendre le monde. Quand l’instinct donne des signes que quelque chose de plus grand que soi se passera, notre cœur, notre esprit et notre corps sont bien souvent happés par la possibilité d’entrer dans un tourbillon de bienfaits.
Ce qui ne veut pas dire que la souffrance ne sera pas au rendez-vous.
Se donner « Corps et âmes », les défenseurs de droits de la personne savent à quoi cela peut mener : la censure, la perte de droits fondamentaux, le harcèlement, et au pire, l’emprisonnement, la violence et la mort.
La sagesse leur dirait de se taire. Paradoxalement, cette même sagesse parle aussi d’instinct et ose interpeller : tu acceptes la ségrégation raciale? Alors, continue à t’asseoir derrière dans l’autobus. Un jour, Rosa Park refusa de s’asseoir dans un banc désigné pour sa race. Elle en a subi les conséquences : elle reçoit une amende de 15 $… en 1955. Une épicerie complète pouvait coûter une vingtaine de dollars!
La sagesse? Laisser tomber l’idée que l’on peut s’asseoir n’importe où, blanc comme noir, et s’asseoir à l’endroit désigné. De plus, elle se vit dans un état, l’Alabama, reconnut pour être l’un des pires en termes de mesures ségrégationnistes et de racisme. Elle sait qu’il y aura des conséquences. Refusant cette loi inhumaine et stupide, « Corps et âme », Rosa Park déclenche sans le vouloir un boycotte de la compagnie qui durera plus d’un an. Ce petit geste lui vaut d’être appelée aujourd’hui par certains la « Mère des droits civiques » aux États-Unis.
Il semblait bien petit le geste de s’asseoir dans un banc non désigné pour les noirs. Mais, se donnant, elle réussit à faire renverser la vapeur raciste, et faire reconnaître que les noirs sont des humains à part entière, et qu’ils peuvent s’asseoir là où ils veulent, au même titre que les blancs.
En cette Ère où le racisme semble revenir en force, se donner « Corps et âme » pour qu’il se taise est certainement un défi dangereux. Défendre un droit fondamental contre l’idée perverse qu’un être humain est moindre à cause de sa race devient de nouveau dangereux. Mais comme Ieshoua, le pain et le vin partagé dans les valeurs de l’Évangile nous donnent des forces pour affronter les valeurs destructrices et proposer celles qui construisent une société plus heureuse, pour annoncer les béatitudes et qu’elles deviennent vraies.
Au prix de notre vie et de notre confort? Parfois oui.
Mario Bard
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