Mon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 2 décembre 2018
par Mario Bard.
Jésus millénariste?
Situation plutôt étrange pour moi qui considère que Jésus n’est pas vraiment un millénariste. Pourtant, ce texte laisse penser le contraire. Est-ce vrai?
J’ai souvent voulu interpréter cet épisode comme étant plutôt symbolique. De quoi? La mort. J’imagine qu’au moment de trépasser, les « puissances des cieux » s’ébranlent pour accueillir un nouveau membre au cœur même du nouveau royaume. Et les témoignages abondent, de personnes qui ont trépassé pendant quelques minutes, et reviennent avec des images à la fois troublantes et merveilleuses.
Mais cette volonté n’enlève rien au fait que Ieshoua est plus concret et plus présent au monde dans lequel il vit. Il y a aussi l’explication qui est celle des spécialistes d’aujourd’hui. C’est la communauté de Luc qui écrit ce texte. Elle entrevoit déjà les grandes difficultés que les chrétiens vont rencontrer sur la route de la fondation des communautés chrétiennes. Il y a eu une première série de ces persécutions à Rome dès la fin du premier siècle. Peu importe : les communautés chrétiennes jeunes et enflammées ont besoin d’être rassurées sur le bien-fondé de ce qu’elles vivent et de l’appel que chacun des individus qui la composent a entendu. Elles ne pourront passer à travers ces temps troubles à moins que d’être encouragées.
Dans notre réalité d’aujourd’hui, les cieux sont également souvent ébranlés. La perte de repères communs peut sembler dangereuse à plusieurs chrétiens des sociétés occidentales. Il y a aussi la perte d’avantages sociaux dans les pays de l’Occident où les habitants de l’après-Deuxième Guerre mondiale ont pu bénéficier en général d’un style de vie plus doux, de l’amélioration de leur santé en général, et de l’achat d’une petite maison assez grande pour élever une famille. Pourtant, ces avantages sont remis en question. La société occidentale, dominée par une économie de la finance qui voue un culte divin à l’idole du profit, remet en question tous les acquis. C’est tout ou rien. Le croit ou meurt revient à la mode. Le luxe et la domination sur les petits redeviennent des droits que ces mêmes sociétés écrasées croient être un chemin vers le divin. La preuve? Tous ces électeurs frustrés qui ont élu un égocentrique originaire du quartier Queens à New York City, et qui n’est pas foutu de rendre hommage aux soldats de la Première Guerre mondiale.
Oui, les valeurs tournent à l’envers. L’argent est considéré comme un moteur essentiel et incontournable, et le profit devient la preuve que Dieu nous aime et croit que le mérite est la première des valeurs. Avant même l’amour du prochain. Horreur qui se répercute sur les plus petits, les plus pauvres. La joie et le partage sont vus comme des valeurs de faibles et appelés à disparaître. Le jour de Noël devient le grand jour du repos après les ventes folles de l’automne : Black Friday, Boxing Day, je ne sais quel autre « Day ». Pendant ce temps, l’humain incapable de se hisser au niveau de la nouvelle religion se meurt de vivre encore.
Le danger imminent pour nous tous, c’est d’entrer dans le cynisme qui accompagne les perdants de la nouvelle religion économique et tous ceux et celles qui se retrouvent forcément au bas de la pyramide, c’est à dire, la plupart d’entre nous. D’où cette série d’avertissements de notre Seigneur Jésus. En ce premier dimanche de l’Avent, il est essentiel de combattre, avec la force que l’Esprit-Saint nous donne, nos propres penchants au cynisme.
Mais, si trop fatigués sur le chemin, épuisé par les nombreux revers que ce monde promet, nous tombons dans les travers et les sinistres péchés que le Seigneur décrit, nous ne pouvons continuer. « Que ton cœur ne se trouble point : qui a Dieu, a tout », écrit Sainte-Thérèse d’Avila. Croyons-y au plus profond. Levons la tête et restons dignes. Bel Avent.
Mario Bard
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