Mon grain de sel

Grain de SelMon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 27 septembre 2015

par Mario Bard.

Morceau de miséricorde

Radicalité de l’Évangile exprimée dans ces phrases. Une radicalité qui ne semble pas faire bon ménage avec une vision « doucerette » que nous avons des Évangiles et de Ieshoua. Est-ce que ce dernier espère nous voir coupés en petits morceaux? Parce que je peux l’affirmer sans peur de me tromper : si j’avais mis en application ces paroles, je serais aujourd’hui mort et en petits morceaux.

Métaphore pour nos vies intérieures? Peut-être. Plusieurs éléments pourraient y être coupés, ce qui nous rendrait l’accès au Dieu de Ieshoua plus simple. Pas que le Père soit compliqué. C’est nous qui, régulièrement, compliquons notre relation à celui qui peut tout et nous aime.

Couper dans ce qui empêche l’union à la Trinité bienheureuse permet d’entrer dans cette liberté proposée. Un défi immense quand on sait à quel point, je le répète, nous compliquons tout : nos relations, notre rapport au monde, nos désirs… rien n’est simple avec un humain.

Couper dans le superflu pour entrer dans l’essentiel. N’est pas aussi ce que le pape François – en visite aux États-Unis – essaie de réaliser avec l’Église catholique et, en particulier, avec sa hiérarchie? Pour que cette institution haïe, honnie, aimée, critiquée, adorée et maintes fois ressuscitée, entre dans la pleine liberté de Dieu, il faut couper tout ce qui ne sert pas l’Évangile.

Même élan pour l’intériorité du chrétien qui cherche à couper ce qui, en lui, ne le fera jamais rentrer dans le Règne de Dieu : adultère, vol, meurtre, etc. Mais aussi, le pharisien en nous, le cœur qui se ferme et oublie « le Dieu lent à la colère et plein d’amour », ou encore, ce cœur qui, parfois, laisse la peur l’envahir pour ne devenir que l’ombre de lui-même.

Comment entrer dans les coupures nécessaires, celles qui nous lieront avec la Trinité bienheureuse?

***

Maurice Zundel, mystique, poète, théologien, conteur, homéliste et figure controversée du catholicisme du 20e siècle, avait peut-être une solution heureuse pour se lier de plus en plus et pour toujours à l’Être essentiel : une pensée sociale qui lie vie spirituelle et valeurs sociales. 

Zundel a également écrit ceci à propos du chômage qui sévissait en 1933 : « Si nous sommes pénétrés de cette conviction, si nous voyons dans la crise actuelle un évènement spirituel d’abord, la preuve par le fait que le primat de l’esprit peut seul assurer une prospérité matérielle à face humaine, et si nous sommes résolus à faire tous les sacrifices nécessaires pour rendre l’économie à sa véritable fonction, qui est de procurer à tous les loisirs sacrés d’une vie suffisamment libre de la matière, pour entendre la voix de l’Esprit, – nous sommes en état de poser le problème du chômage, et nous l’avons virtuellement résolu. L’homme d’abord, et dans l’homme : l’esprit et dans l’esprit : Dieu.

Il faut donc avant tout, “renaître de l’Esprit”, et consentir à tout quitter pour suivre son appel, et promouvoir son règne – renaissance intérieure offerte à chacun, et qui demeure son secret, mais qui n’en est pas moins sa première obligation.

Quiconque se dérobe à cette exigence ne veut pas sincèrement la solution de la crise, et refuse la contribution la plus essentielle à l’instauration d’une économie véritablement humaine. On ne peut que remettre ici chacun aux inspirations de sa conscience. »

Zundel écrit « tout quitter » : nous pourrions aussi remplacer par « Tout couper » ce qui n’est pas de l’essentielle liberté de Dieu.

***

En principe, je devrais être en petits morceaux. Tant de nuits ont éreinté ma vie et je me suis laissé si souvent prendre au jeu des soucis de la vie. J’étais sûr de ne plus faire partie du plan de Dieu. Mais, au risque de mourir à moi-même, j’apprends de plus à couper ce qui mène à la géhenne pour n’apprendre qu’à m’accrocher à la miséricorde ultime de Dieu. Je suis un homme en morceaux que la divine Miséricorde remet debout, en un seul morceau. 

Mario Bard

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *