Mon grain de sel

Grain de SelMon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 11 octobre 2015

par Mario Bard.

Aimer grâce au don d’un sourire

Je n’ai pas le goût de tout laisser pour le suivre. La souffrance et la persécution qui en découle sont trop puissantes. Et la mort qui suit ne semble parfois mener nulle part. Je divague?

Observez comme les catastrophes s’accumulent sur notre monde! Guerre en Syrie; État islamique meurtrier; austérité qui crée la faim en Occident; fusillade sans fin aux États-Unis. Non, je n’ai pas le goût de tout laisser pour le suivre et risquer ma vie devant ces tragédies, ces catastrophes, ces nuits si remplies de haine et de mort.

Et puis, nos dirigeants continuent de croire que la terre a besoin d’énergies fossiles, de fortunes incroyables et de l’industrie de la guerre pour survivre. Ils ne croient pas en l’émergence d’un monde meilleur. Ou bien, ils sont si peu nombreux à insister sur cette création d’un autre monde!

À certains jours, un mur me sépare de ma foi en la résurrection après la mort. Ces jours-là, être un chrétien devient une tâche ardue, quasi impossible. Les démons sont séduisants; puissance, rejet de l’autre; recherche du gain à tout prix; plaisirs sans fin; etc.

Où est le Dieu père de l’Évangile?

***

Avez-vous vu le sourire de la dame que j’ai aidée sur la rue? Non bien sûr, j’étais seul avec elle malgré la foule. Pourtant, il était grand comme l’Océan Pacifique, rempli de quiétude comme le lac d’automne au coin de chez nous, et silencieux comme un bonheur d’hiver au coin du feu.

Après la pluie vient le beau temps. Les nouvelles sont mauvaises, certes.

Mais, au coin de ma rue, il y a toujours cette dame qui, par sa mendicité sereine, me rappelle qu’il y a des gens avec qui je peux abandonner ma dureté, mon manque de compassion et prendre un moment pour retrouver mon humanité. Mourir à soi reprend alors tout son sens. Parce que je la connais – nous conversons parfois des heures devant les passants –, la dame me sourit. Je lui souris. Nous abandonnons les carapaces bâties au fur et à mesure des rebuffades, des trahisons et des mondanités qui habitent le monde.

Nous mourons à soi.

Bien qu’il soit petit, ce geste premier de sourire ouvre un univers en mon cœur qui est aussi grand que le cosmos. Sinon plus! Le désir de me donner, mais surtout, d’abandonner mes richesses intérieures superflues. Ma personnalité profonde qui, dans ma croyance (naïve diront les mauvaises langues), espère toujours le meilleur; crois que l’autre est aussi capable de bonté; refuse de céder au chantage ambiant du cynisme. Toutes des richesses qui forment des murs extraordinaires.

Enfin, grâce à a relation avec la vieille dame, grâce à notre amour commun de la vie, mis ensemble pour mieux marcher, je pourrai certainement vivre.

***

La croix, la persécution, les difficultés inhérentes à l’annonce de l’Évangile, ne sont pas attirantes. Pourtant, quand le geste d’aimer devient vraiment don, le mystère de la souffrance semble être dépassé et surmonté. Rien de joyeux, rien de facile, mais toujours un désir de vivre au présent.

Aimer demande cet équilibre de l’abandon à l’autre. Un constant va-et-vient entre soi et les autres, entre soi et le Dieu-Père. Un chemin qui, quand il est pleinement assumé et marché, permet de « déplacer des montagnes ». Au-delà des journées noires et des mensonges d’une société adoratrice du veau d’or.

Mario Bard

 

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