Mon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 28 août 2016
par Mario Bard.
Un regard à transformer
Se placer devant l’autre comme on se place devant un enfant pour le nourrir. Malheureusement, je n’ai pas eu d’enfants. J’ai vu mes frères, mes belles-sœurs, cousins, cousines, ami(e) s avoir des enfants. Je peux dire avec grande admiration qu’il sut donner l’amour nécessaire. Ils se sont placés devant l’enfant avec respect, admiration, bonté, patience, attente, joie, désir. Ils se sont placés devant l’enfant pour le nourrir.
J’ai l’impression que le chrétien doit apprendre à se placer devant les autres – ami(e) s, inconnus, connaissances, amoureux, etc. – comme il se placerait devant un enfant à nourrir. Sans condescendance, être avec l’autre prêt à aimer jusqu’au bout.
Quel défi! Pourtant, c’est peut-être la seule attitude qui nous soit demandée pour entrer dans cette humilité permettant de se placer à la dernière place. Celle que personne ne veut. Celle qui est honnie par les puissants. Ceux et celles qui dominent et se dominent… en apparence. Je me méfie d’une personne qui refuse de s’excuser, ou de même considérer le pardon comme une option. Sa puissance cache une faiblesse très grande : celle de ne pas savoir reconnaître sa propre blessure et de l’accueillir. Elle ne pourra jamais s’asseoir à la dernière place. Son égo tombera et sera, encore une fois, blessé.
Observez… les artistes qui réussissent, et toutes autres personnalités publiques d’ailleurs, ont souvent une humilité et un réalisme qui désarme. Quand on les rencontre, il faut nous-mêmes descendre du piédestal que nous avons dressé pour elles. Nous sommes plus exigeants, nous avons des attentes au-delà de l’humanité de la personne : nous en faisons un demi-dieu, de cette race qui rend esclave…
***
Il y a des jours où je me décourage. Je n’ai pas de force pour continuer. Je reste assis et je ne sais pas quoi faire. Mon esprit est agité par tant d’injustices, de bêtises, de cupidités à l’état pur! Un raciste bigot, amateur de la loi et l’ordre qui créent le chaos, pourrait devenir président des États-Unis. Les patrons se paient des salaires de plus en plus élevés, alors que leurs travailleurs peinent à joindre les deux bouts. Les services de santé et d’éducation sont coupés.
Bref, les plus riches ont oublié d’accueillir à leurs portes les autres. Ils restent bien assis dans leurs tours d’ivoire et fêtent leurs réussites. Ils arrivent même à justifier les gestes de plus en plus égoïstes par de vibrants « Je le mérite », ou encore, « J’ai réussi par moi-même : Basta! ». L’illusion est si forte et douce dans les cœurs qui se ferment aux humains qui vivent autour d’eux!
La bonté proposée par Ieshoua ne sera jamais teintée de complaisance et de pitié dénuée d’amour et de compassion. La bonté proposée par Ieshoua est un geste de tous les jours, fait par quelqu’un qui n’oublie jamais à quel point il ou elle est sauvée par amour et non par mérite.
***
Hier, j’ai vu un papa qui traversait la rue avec son enfant. Ça m’a fait penser qu’il y a dans ce geste banal, quotidien, une dose d’amour. En effet, le papa pourrait décider de laisser son enfant traverser seul, affronter la circulation, courir le risque d’être frappé par une voiture. Au nom de l’indépendance de l’enfant. Mais, c’est oublié que l’enfant qui traversait n’avait pas cinq ans – selon mes estimations – et qu’il semblait heureux, fier de traverser la rue avec papa.
Un jour, il lui prendra le goût d’être indépendant. De traverser seul. Mais, j’en suis sûr, en des domaines plus complexes et plus humains – amour, service, don, étude, par exemple –, il lui prendra sûrement l’envie de vouloir prendre la main de papa et de lui demander des conseils. Comment traverser la rue de ce premier amour? Comment traverser des études qui ne sont pas ce que j’attendais? Qu’est-ce que la mort?
L’espérance, c’est que papa sera présent. Et l’espérance que j’ai pour le monde, c’est que nous apprenions tous à devenir des papas et des mamans pour ce monde. Si nous osions adopter ce regard, notre rapport aux autres, à la gestion de nos organisations, à l’approche des plus pauvres, en serait transformé à jamais. Un amour se donnerait de manière permanente.
Je nous le souhaite. Amen.
Mario Bard.
Louise Pelletier
Merci de tout coeur!
Je suis touchée par vos paroles censées et tellement humaines…tout ce qui manque souvent dans ce siècle de vitesse, de technologie où les humains vivent l’illusion d’avoir le contrôle sur eux et sur les autres, la nature et même la vie.
Mais il y a une sorte de regard, d’écoute de présence qui est tellement en amour devant le Beau, la vie que malgré toutes les richesses matérielles, personne ne pourra lui voler, car c’est une richesse venue de son âme.
Heureuse est cette personne humaine qui apprend doucement ce regard, cette écoute, ce ressenti, parfois très souffrant, souvent ayant le sentiment de manquer tant d’amour de la part des autres, mais Oh! combien plus vibrant, riche, relationnel et comblant surtout quand il y a un partage dans le tout.