Mon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 10 août 2014
par Mario Bard.
Malgré les bourrasques
Le plein croyant, c’est comme un super Pierre, un super roc! Un super humain qui ose croire que le Fils de l’Homme est présent auprès de lui sur la mer déchaînée, et qu’avec son esprit, son soutien, il avancera sans peine, et ce, malgré les bourrasques.
Le super croyant est rare. Ou plutôt, il n’est pas ce que nous pensons. La plupart du temps, le super croyant se fera discret. Loin d’être comme un télé-évangéliste qui répète le nom de Jésus comme un mantra magique, le super croyant avance même s’il ne sent plus les premières heures du délice de l’amoureux avec son Dieu. C’est à ce moment que, petit à petit, la foi s’installe. Et malgré les bourrasques, le super croyant avance sur la mort, même s’il doit lui-même y laisser sa vie.
Pierre s’enfonce parce qu’il a peur. Il ne fait pas encore totalement confiance à l’Esprit de Ieshoua et de son Père. Bien qu’il voit Ieshoua, son âme est loin d’en avoir saisi toute la substance. Il n’a pas totalement confiance. La peur de la bourrasque est toujours présente. Selon le dictionnaire informatique Antidote, une bourrasque est un « nom féminin qui désigne un coup de vent bref et violent ».
On peut comprendre Pierre. Après tout, le vent, ce grand porteur d’air, peut parfois être porteur de destruction comme dans les tornades et les ouragans. De plus, les pêcheurs devaient bien connaître les tempêtes. Ils avaient raison d’avoir la peur au ventre. Elles renversent les bateaux, tuent les marins et les mènent directement au pays de la mort qu’est la mer. La tristesse accompagne la bourrasque.
Quelles sont les bourrasques qui nous font le plus peur? Les changements brusques et violents qui peuvent nous faire tomber?
Pourtant, le croyant chrétien ne peut se laisser prendre par la peur. Ni l’Église. Et pour devenir un super homme, il faut certainement se laisser prendre par le souffle qui passe. Une bourrasque déstabilise, détruit, tue. Le souffle fait vivre. Ieshoua représente ce souffle. Il est insufflé par un Esprit vivant qui refuse la peur.
La peur est une compagne terrible. Elle tue, paralyse, enfonce.
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Si l’Abbé Pierre avait eu peur de déranger les instances politiques de son temps, il n’aurait jamais dénoncé la mort d’un homme dans les rues de Paris. L’hiver 1954 est très froid. Le prêtre lance un appel sur Radio-Luxembourg, ce qu’on appellera « l’insurrection de la bonté ». Il récolte en quelques jours 500 millions de francs, dont deux de la part de Charlie Chaplin, qui dira : « Je ne les donne pas, je les rends. Ils appartiennent au vagabond que j’ai été et que j’ai incarné. »
Si l’Abbé Pierre avait eu peur…
En Chine, j’ai eu la chance de rencontrer un évêque qui, pendant 25 ans, s’est retrouvé dans les camps de réhabilitation à l’époque de Mao. Petit et vieilli, le fond de ses yeux était pourtant rempli d’une lumière incroyable. Il avait survécu aux milliers de bourrasques de la prison. Le cocon d’une prison n’est pas exactement celui d’un retraitant… Les bourrasques violentes viennent de partout. Malgré tout, l’évêque a gardé la foi. Sa foi, intacte, est devenue un exemple pour tous ceux qui l’entourent.
Si l’évêque chinois avait eu peur…
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Peut-être que l’Église est comme un artiste. Elle ne doit pas avoir peur des bourrasques violentes lancées par les critiques, les sans esprits, les incultes et les moralistes qui demeurent dans le bateau. Sur la mort, il nous faut marcher, en communauté, vers le Christ Ieshoua.
Mais quelles audaces l’Église doit-elle avoir face aux bourrasques? Sur quelles morts « Pierre -Roc-Humain » doit-il marcher? Difficile à dire sans discerner, et difficile à dire sans la communauté. Par contre, une chose est sûre : elle doit se tenir loin des conventions. Son chemin est celui de l’Amour. Et l’Amour ne sera jamais proche des discours dominants. Heureusement!
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