Mon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 18 mai 2014
par Mario Bard.
Versailles, ou le bonheur?
Aujourd’hui, acheter une maison est presque un jeu d’enfant. Ceux qui ont expérimenté la rencontre avec un agent immobilier savent que ceux-ci ont un objectif bien précis : vendre. À tout prix et parfois un peu trop promptement. La commission est alléchante et vite engrangée. Mais, sont-ils tous intéressés à ce que vous soyez heureux dans votre nouvelle demeure? J’en doute. Sur quatre agents rencontrés dans ma vie comme client potentiel, je peux dire que la moitié n’avait qu’un intérêt : le leur. Les formules apprises par cœur et la rapidité avec laquelle on m’incitait à acheter m’ont troublé.
Pourtant, une phrase célèbre et mensongère traverse ce secteur : « C’est l’achat de votre vie! » Peut-être. Mais, si j’ai besoin de la revendre dans deux ans parce que j’y ai des problèmes – voisins turbulents, vices cachés insurmontables, déménagement pour de l’emploi –, ma vie ne tombe-t-elle à rien? Bien sûr que non.
La demeure est certes un lieu d’arrêt indispensable pour l’évolution humaine. On y voit grandir les enfants. On leur donne des espaces, pour qu’ils puissent jouer et se sentirent en sécurité. On y célèbre les anniversaires et les grands passages de l’année que sont Pâques et Noël. En Occident, elle est cette oasis idéalisée où crépite le feu dans la cheminée.
Par contre, une demeure devrait revêtir tous les types de personnes qui parcourent la planète; sédentaire, nomade, semi-nomade. Aujourd’hui, il me semble que la demeure est presque devenue un luxe, un lieu de design hyper confort et, finalement, peu accessible à des humains de tous les jours. Elle prend des proportions gigantesques, « châteauesque » dans certaines banlieues-dortoirs, chacun voulant se transformer en seigneur de son domaine.
Alors que celle-ci pourrait être plus simplement le lieu du repos, de l’apprentissage et de la bonté envers soi-même et les autres, certaines demeures terrestres finissent par se refermer sur elle-même. Au bout de 30 ou 40 ans, la poussière envahit les lieux. L’habitant, autrefois si fier, perd son autonomie. Il doit vendre le château. De quoi ses souvenirs seront-ils remplis? De la joie et du bonheur de l’accueil? Ou encore de sa propre retraite interminable, dans un lieu certes immense et beau, mais vide et dont le décor s’affadit à force de n’être qu’un reflet de la mode d’antan.
D’ailleurs, qui visite le château de Versailles en France se rend bien compte de la lourdeur du pouvoir. Les velours en témoignent. Ceux-ci sont maintenant pleins de poussières. La horde de touristes qui envahit les corridors tous les jours de l’année s’approprie ce lieu mythique. Très impressionnant, je l’admets. C’est même grandiose Versailles. Est-ce accueillant comme la chaumière de Marie-Antoinette, ou même celle des fées de la Belle au bois dormant? Pas sûr. Est-ce que Versailles invite à créer le bonheur? Pas sûr.
Et moi, est-ce que la demeure que j’habite est un lieu qui permet de se poser pour devenir plus humain, accueillant et solidaire?
La demeure que Ieshoua choisit de nous faire habiter, à quoi ressemble-t-elle? Proprette, remplie d’un design unique, avec une cuisine qui sera occupée une fois par an par des gens bien chics qui auront pris le temps d’appeler un traiteur? Ou bien sera-t-elle ce lieu d’accueil de tous, sans aucun jugement, où partage et amitié sont les premières règles de l’art de vivre, bien avant la fourchette qui va à côté de la cuillère?
Certes, l’Art de la table est important et démontre même un grand respect pour les invités. Cependant, Ieshoua prépare des demeures pour ses frères et ses sœurs qui sont avant tout des lieux de rencontre et de louange. Rencontre du père, dans la prière simple de la parole du Notre-Père. Rencontre de l’autre, différent de moi, mais complémentaire et toujours nouveau.
Des lieux remplis de ce que Ieshoua nous apprend à travers les Évangiles. Est-ce la maison que j’achèterai et dans laquelle je désire vivre?
Mario Bard
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