Évangile du dimanche 25 avril 2021

4e dimanche de Pâques (année B), selon l’écrit de Jean 10, 11-18

Du pain sur la table11 Moi je suis le pasteur, le bon:
le bon pasteur fait don de sa vie pour les brebis.

12 Le salarié -qui n’est donc pas pasteur car les brebis ne sont pas les siennes-
voit-il venir le loup: il abandonne les brebis et s’enfuit
le loup s’en empare et les disperse-

13 car il est salarié et n’a pas souci des brebis.

14 Moi je suis le pasteur, le bon,
et je connais les miennes et les miennes me connaissent,

15 de même que le Père me connaît et que je connais le Père.
Ma vie, j’en fais le don à mes brebis.

16 J’ai d’autres brebis qui ne sont pas de cette bergerie.
Celles-la il me faut les conduire et elles entendront ma voix
et elles deviendront un seul troupeau, un seul pasteur.

17 Ce pour quoi le Père m’aime,
c’est que je fais don de ma vie pour la recevoir à nouveau.

18 Personne ne me l’enlève mais moi, j’en fais le don de moi-même.
J’ai pouvoir de la donner et j’ai pouvoir de la recevoir à nouveau.
C’est la directive que j’ai reçue de mon Père.

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Le commentaire du pain sur la table,

par Georges Convert.

Ces paroles de Jésus nous font pressentir la connaissance intime qu’il a de Dieu
et le lien unique qu’il a développé avec ses disciples. Qu’est-ce cela nous dit de Dieu?
Ce lien avec Jésus peut-il être encore le nôtre aujourd’hui?

La place de ce texte dans le récit de Jean
Cette parabole du pasteur semble dite dans le cadre de la fête juive de la Dédicace.
Elle commémorait alors la restauration du Temple par Judas Maccabée en l’an 164.
Judas venait de chasser les Syriens qui occupaient le pays
et qui avaient profané le Temple en y installant la statue d’un de leurs dieux.
Au temps de Jésus, alors que Rome occupe Israël depuis près de 100 ans,
cette fête avivait l’attente d’un nouveau Maccabée qui chasserait les Romains.
De plus, les gens étaient écrasés par les impôts prélevés par l’occupant.
Jésus est donc en face d’un patriotisme exalté et d’une grande fièvre religieuse.
Qui peut être le vrai leader du peuple de Dieu pour le conduire à la libération?
Jésus, ou les chefs pharisiens, ou ces militants armés que sont les zélotes?
Le chapitre 10 de Jean fait suite à la guérison de l’aveugle-né.
Jésus se trouve à Jérusalem où il guérit un aveugle de naissance un jour de sabbat.
Il a de plus contesté que la cécité de l’aveugle ait un lien immédiat avec son péché.
Ce miracle irrite fortement les Pharisiens qui s’opposent de plus en plus à Jésus.
Ils vont rejeter, excommunier de la synagogue l’aveugle guéri
parce qu’il ne veut pas condamner Jésus comme étant un pécheur,
un homme possédé de l’esprit du mal:
Nous savons que cet homme est un pécheur! (Jn 9,24).
Et l’aveugle réplique: Dieu n’exauce pas les pécheurs.
Si un homme fait sa volonté, Dieu l’exauce.
Si cet homme n’était pas de Dieu, il ne pourrait rien faire
(Jn 9,24,31.33).
La question qui est posée avec acuité est donc celle-là:
de qui Jésus tient-il sa mission: de Dieu ou du diable?
Jésus va répondre par la parabole du bon pasteur.

Moi, je suis le pasteur, le bon.
Jésus se décrit à l’aide d’une image de la vie quotidienne.
Dans les villages de Palestine, chaque matin, le pasteur se rend à l’enclos.
Son troupeau -et ceux des autres pasteurs- y ont passé la nuit,
à l’abri des voleurs et des loups, car l’enclos est gardé par un portier.
Pour voler une brebis, les voleurs devront donc escalader sans bruit la clôture.
Chaque pasteur, qui se présente à la porte, a un timbre de voix qui lui est propre,
une façon bien à lui d’appeler ses bêtes.
Les brebis qui vont sortir seront celles qui appartiennent au pasteur qui les appelle.
Peut-être même le pasteur a-t-il donné un nom à chacune de ses bêtes.
Certains pasteurs sont propriétaires de leur troupeau; d’autres travaillent comme salariés.
Dans le jour, le rôle du pasteur est de conduire le troupeau vers les lieux de pâturage
où il pourra se nourrir. Pourquoi Jésus choisit-il cette image du pasteur?
Dans la Bible, le titre de pasteur appartient d’abord à Dieu: Voici le Seigneur-Dieu:
Tel un pasteur il fait paître son troupeau, de son bras il rassemble les agneaux,
il les porte sur son sein, il conduit doucement les brebis mères
(Is 40,10 s).
Ceux qui -au nom de Dieu- transmettent l’Enseignement divin au peuple
reçoivent aussi le titre de pasteur.
Ce sont les juges, les prêtres ou les prophètes, et surtout le roi-messie.
[Dieu] choisit David son serviteur, le prenant dans une bergerie.
Il le fit venir de derrière ses brebis et Il en fit le pasteur de son peuple.
Pasteur au coeur irréprochable, [David] les guida d’une main avisée
(Ps 78,70-72).
Souvent d’ailleurs les prophètes vont fustiger les rois-messies ou les grands-prêtres
parce qu’ils sont de mauvais pasteurs: Malheur aux pasteurs qui se paissent eux-mêmes!
N’est-ce pas le troupeau que les pasteurs doivent paître?
Vous n’avez pas fortifié les bêtes chétives, vous n’avez pas guéri la malade,
vous n’avez pas ramené celle qui s’écartait, vous n’avez pas cherché celle qui était perdue…
mais vous avez exercé votre autorité par la violence et l’oppression
(Éz 34,2-4).
On songe tout naturellement aux Pharisiens et à l’aveugle:
ceux-ci n’ont rien fait pour sa guérison et ils l’ont chassé de la synagogue.
Jésus -au contraire- a guéri celui qui est malade
et -comme un bon pasteur- il a ramené dans la communauté
celui que la maladie rendait impur et éloignait de la synagogue.
Selon la vision de Jésus, les Pharisiens comme les scribes, spécialistes de la Tora,
empêchent le croyant de vivre une vraie vie spirituelle:
pour eux, l’absolu est d’être fidèle aux préceptes car il faut être correct devant Dieu.
Malheureusement cette fidélité fait oublier le lien d’amour qu’on doit avoir avec Dieu.
Au contraire, Jésus est celui qui fait vivre d’une vie aimante avec Dieu-Père.
Il veut guider les siens vers un Dieu qui les aime et qui attend leur amour.
C’est par compassion, avec miséricorde, qu’il soigne, guérit et enseigne
ces foules qu’il perçoit comme des brebis sans pasteur.
Jésus est donc le bon pasteur selon le coeur de Dieu.

Le bon pasteur fait don de sa vie à ses brebis.
La bonté du pasteur n’est pas une douceur mièvre,
comme pouvaient le suggérer certaines images anciennes du Sacré-Coeur.
Cette bonté le conduira à risquer sa vie pour sauver la vie des siens.
Jésus fait don de sa vie pour ses brebis:
Jésus qui avait aimé les siens les aime jusqu’à l’extrême, dira Jean au début de la passion (Jn 13,1).
Et dans les entretiens au cours du Dernier Repas, Jésus répétera:
Personne n’a d’amour plus grand que celui qui donne sa vie pour ses amis (Jn 15,13).
Comment cela va-t-il se réaliser pour Jésus?
Le message d’un Dieu qui aime et qui pardonne va provoquer le rejet de Jésus
par l’élite religieuse, notamment les scribes.
L’image d’un Dieu qui n’est qu’amour et pardon
va à l’encontre de leur conception de la puissance de Dieu.
Le Dieu tout-puissant se doit de venger son honneur et sa gloire en punissant les mal-faisants.
Et il doit manifester sa sainteté à ses fidèles en les sauvant des épreuves.
Mais Jésus enseigne que Dieu manifeste son amour
aussi bien aux justes qu’aux injustes (cf Lc 4,25-27).
Mais aimez vos ennemis et vous serez les fils du Très-Haut,
car il est bon, lui, pour les ingrats et les méchants
(Lc 6,35).
Dieu accorde même une priorité d’attention à ceux qui sont mal-faisants
parce qu’il veut les sauver par son pardon d’amour.
Devant la haine dont il va faire l’objet de plus en plus, Jésus ne fuira pas.
Peut-être en a-t-il eu la tentation lorsqu’il s’est réfugié au-delà du Jourdain:
Une fois de plus, ils cherchent à l’arrêter, mais il échappe à leurs mains.
Il s’en retourne au-delà du Jourdain, et il y demeure
(Jn 10,39).
C’est lest là qu’il apprend la mort de son ami Lazare et qu’il se décide alors
à monter à Jérusalem en dépit de la menace qu’il sait peser sur lui:
Thomas dit alors: «Allons, nous aussi, et nous mourrons avec lui» (Jn 11,16).
Jésus va affronter la mort, une mort qui est la conséquence de son message.
«Jésus, par son attitude et sa prédication a pris des positions
qui l’ont conduit à un conflit dans lequel il a été perdant.
Il n’a pas, devant le danger, renié les décisions qui l’ont amené à cette opposition.
Ainsi la mort de Jésus est la conséquence de sa vie.
Jésus demeure fidèle à son option, il ne renie rien de ce qu’il a dit et fait en public.
Il meurt innocent devant le pouvoir politique et calomnié par le pouvoir religieux.
L’image de Dieu que [ce pouvoir religieux] véhicule et son désir de puissance
ne peuvent s’accorder à la liberté responsable qu’exige Jésus dans la relation avec Dieu.
Ce pouvoir oppose son Dieu à Jésus: pour ce pouvoir Jésus est un blasphémateur»

(C. Duquoc, dans Assemblées du Seigneur 60, p. 42-51).
Jésus va offrir sa vie comme un ultime geste d’amour et de pardon:
pardon pour Pierre qui va le renier et à qui il lave les pieds en signe d’affection,
pardon pour Judas qui va le trahir et avec qui il partage son pain, signe d’amitié,
pardon pour ceux qui le mettront à mort: Père, pardonne-leur (Lc 23,34).
En pardonnant, Jésus refuse d’entrer dans la logique de ses adversaires.
Il ne peut que livrer sa vie à ceux qui veulent lui faire violence.
Voici ma vie livrée. Voici mon sang versé, dira-t-il lors du Dernier Repas.
Cette mort est une décision personnelle et libre de Jésus.
Elle est donnée comme un geste d’amour.
Parce que -dans cette mort et par elle- Jésus aime parfaitement,
son coeur pourra être vraiment une source d’amour
pour ceux qui l’accueilleront comme leur compagnon de vie.
La mort de Jésus est un don de sa vie, don qui fait vivre ceux qui le reçoivent.
La vraie libération qu’il apporte comme messie est celle de libérer de l’égoïsme
pour enfanter à l’amour, en vivant d’une vie divine, immortelle.
Ce pour quoi le Père m’aime, c’est que je fais don de ma vie pour la recevoir à nouveau.
«En Jésus seul, l’amour a été plus fort que la vie.
Sa mort est la mort d’un homme absolument libre,
absolument détaché de soi et de tout, totalement aimant.
Comment Dieu ne l’accueillerait-il pas en Lui, afin qu’il vive éternellement en Lui?
Le Christ n’a vécu que par le Père et pour le Père, donc en un Autre plus que soi.
C’est cela, l’amour: vivre en un autre. Mais vivre en un autre, c’est bien mourir à soi.
Dire que Jésus est ressuscité, ou que le Père a ressuscité Jésus,
c’est donc dire que, pour cet homme pleinement homme en qui l’amour a été plus fort que la vie,
l’amour est pour toujours plus fort que la mort»

(F. Varillon, Joie de croire, joie de vivre, Centurion, p. 97-98).
Parce qu’il sera vivant pour toujours, Jésus sera à jamais le bon pasteur,
le donneur d’une vie d’amour qui conduit à l’immortalité.

Je connais mes brebis et mes brebis me connaissent,
de même que le Père me connaît et que je connais mon Père.

Dans la Bible, « connaître » traduit la relation que l’on a avec celui qui est connu.
Il ne s’agit pas d’abord d’un savoir sur l’identité extérieure (qui fait quoi),
mais d’une connaissance intime de quelqu’un par l’amour.
Connaissance qui est un partage des désirs les plus profonds,
une communion à ses desseins les plus secrets.
Le psaume 138 exprime la connaissance intime que Dieu a de celui qu’il aime:
Seigneur, tu m’as scruté et tu me connais. Tu connais mon lever et mon coucher.
Tous mes chemins te sont familiers. … C’est toi qui as créé mes reins.
Tu m’abritais dans le sein maternel. … Dieu, scrute-moi et connais mon coeur.
Éprouve-moi et connais mes soucis. Conduis-moi sur le chemin d’éternité
(Ps138,1-24 passim).
Le Dieu de la Bible n’est pas d’abord le Dieu Créateur,
il n’est pas le Tout-Puissant qui se tiendrait loin de ses créatures.
Pour Dieu, chaque être humain n’est pas un individu parmi des milliers de milliards.
Au contraire, chacun est unique, aimé d’un amour personnel:
La femme oublie-t-elle son nourrisson,
oublie-t-elle de montrer sa tendresse à l’enfant de sa chair?
Même si celles-là oubliaient, moi, je ne t’oublierai pas!
(Is 49,15).
Un bref instant, je t’avais abandonnée, mais sans relâche, avec tendresse, je vais te rassembler.
Dans un débordement d’irritation, j’avais caché mon visage, un instant, loin de toi,
mais avec une amitié sans fin je te manifeste ma tendresse
(Is 54,7-8).
Ne crains pas, je t’ai racheté; par ton nom je t’ai appelé; tu es à moi.
Car tu comptes beaucoup à mes yeux, tu as du prix et je t’aime
(Is 43,1.4).
Cet amour qui vient de Dieu a été reçu à la perfection par Jésus de Nazareth.
Jésus n’a cessé de dire l’intimité qui existe entre lui et ce Dieu qu’il nomme Abba (Papa):
Le Père aime le Fils et il a tout remis en sa main (Jn 3,35).
(Jn 5,19) Amen, je vous le dis, le Fils ne peut rien faire de lui-même,
mais seulement ce qu’il voit faire au Père: car ce que fait le Père, le Fils le fait pareillement.
C’est que nul n’a vu le Père, si ce n’est celui qui vient de Dieu: Lui, il a vu le Père
(Jn6,46).
Ne crois-tu pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi?
Les paroles que je vous dis, je ne les dis pas de moi-même!
C’est le Père qui, demeurant en moi, accomplit ses propres oeuvre
s (Jn 14,10).
Moi et le Père nous sommes un (Jn 10,30).
Ce que Jésus vit avec le Père est le modèle de sa manière d’être avec ses disciples.
Ils ne sont pas pour lui uniquement des disciples venus entendre son enseignement.
Il a lié avec eux des liens d’amitié qui rendent chacun unique à ses yeux:
Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés; demeurez dans mon amour (Jn15,9).
L’entretien du dernier repas marque le degré d’amour qui lie le Maître à ses disciples:
Je ne vous appelle plus serviteurs… mais je vous appelle amis,
parce que tout ce que j’ai écouté de mon Père, je vous l’ai fait connaître
(Jn 15,15).
Le disciple, qui écoute et reçoit l’enseignement, était habituellement appelé serviteur.
Au soir de sa vie, Jésus ne considèrera plus les Douze comme des disciples-serviteurs:
ils seront devenus ses amis car ils communieront dans une même connaissance du Père:
Qui me voit, voit le Père.Personne ne va au Père si ce n’est par moi (Jn 14,9.6).
En ce jour-là, vous connaîtrez que je suis en mon Père
et que vous êtes en moi et moi en vous
(Jn 14,20).
L’amour gratuit que Dieu lui porte, l’intimité qu’il vit avec le Père,
voilà le modèle de l’amour que Jésus porte à chacun de ses disciples.
C’est aussi l’amour qu’il portera à Nicodème, à la Samaritaine, à Zachée, à Lazare,
Marthe et Marie, ses amis de Béthanie.
C’est aussi l’amour qu’il a pour chacun de nous aujourd’hui:
«Nous ne sommes pas seuls, nous sommes habités,
nous avons un ami qui nous accompagne sur tous les chemins de la vie.
Nous sommes escortés par Lui intérieurement, comme les disciples d’Emmaüs.
Il est là à notre insu. Il est là qui nous attend avec tout son Amour.
Et c’est pourquoi nos problèmes ne sont pas nos problèmes seulement:
tous nos problèmes sont les problèmes de Dieu»

(M. Zundel, Ton visage, ma lumière, Desclée, p. 101).
Pour que cela soit, encore nous faut-il rencontrer Jésus dans une vraie intimité
à travers une lecture priante de l’Évangile.
On sait que les mots pasteur et repas ont la même racine qui signifie paître, manger.
La fonction même d’un pasteur est de nourrir la vie de ses brebis:
Je suis venu pour que les gens aient la vie et qu’ils l’aient en abondance (Jn 10,10).
Cette vie abondante est la vie spirituelle vécue dans l’amour, la vie même de Dieu.
Cette vie de Dieu vit en nous dans la mesure où nous sommes nourris de sa parole,
où nous vivons comme Lui, selon son enseignement, selon son esprit.
La vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent,
toi le seul vrai Dieu et celui que tu as envoyé, Jésus Christ
(Jn 17,3).
Chaque disciple doit pouvoir reprendre le mot de gratitude de Paul (Ga 2,20):
Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est Christ qui vit en moi.
Car ma vie présente dans la chair,
je la vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et s’est livré pour moi.

J’ai d’autres brebis qui ne sont pas de cette bergerie.
Celles-la il me faut les conduire
et elles entendront ma voix et elles deviendront un seul troupeau, un seul pasteur.

Nous pouvons sans doute comprendre cette phrase de Jésus en pensant qu’il offre son Évangile,
non seulement aux Juifs mais aussi aux gens des autres peuples.
Lorsqu’il quitte la vie terrestre, ses derniers messages nous le disent clairement:
Allez donc: de toutes les nations faites des disciples,
leur apprenant à garder tout ce que je vous ai prescrit
(Mt 28,19-20).
Le Christ souffrira et ressuscitera des morts le troisième jour;
on prêchera en son nom la conversion et le pardon des péchés à toutes les nations,
à commencer par Jérusalem
(Lc 24,46-47).
Le règne de Dieu -dont Israël était le prototype-
va aussi se concrétiser dans une communauté faite de gens de tous les peuples.
Le grand-prêtre juif Caïphe prophétisait lorsqu’il disait:
Il faut que Jésus meure pour la nation, et non seulement pour elle
mais pour réunir dans l’unité les enfants de Dieu qui sont dispersés
(Jn 11,52).
Paul travaillera très fort à réaliser cette unité universelle voulue par Jésus
en adressant le message de l’Évangile aux païens:
[Christ] est venu annoncer la paix à vous qui étiez loin, et la paix à ceux qui étaient proches.
Il a voulu ainsi, à partir du Juif et du païen, créer en lui un seul homme nouveau,
en établissant la paix, et les réconcilier avec Dieu tous les deux en un seul corps,
au moyen de la croix: là, il a tué la haine.
Et c’est grâce à lui que les uns et les autres nous avons l’accès auprès du Père.
Ainsi, vous n’êtes plus des étrangers, ni des émigrés;
vous êtes concitoyens des saints, vous êtes de la famille de Dieu.
Vous avez été intégrés dans la construction qui a pour fondation les apôtres et les prophètes,
et Jésus messie lui-même comme pierre maîtresse
(Ép 2,15-20).
C’est autour de la personne de Jésus que doit se réaliser l’unité de tous ses disciples.
Malheureusement, il y a aujourd’hui bien des divisions entre les chrétiens.
Qu’adviendrait-il si protestants, orthodoxes et catholiques
avaient la volonté de partager surtout leur amour de Jésus
-ce qui lie chacun d’eux personnellement au Maître-,
plutôt que de se quereller sur des points de doctrine ou des différences de culte?

C’est Lui, Jésus, et lui seul, qui est le vrai pasteur
et c’est autour de lui et en lui que peut se réunir l’unique troupeau.
Le règne de Dieu ne se limitera pas davantage aux frontières de l’Église de Jésus
car c’est pour le monde entier que Dieu a donné son Fils (Jn 3,16):
Dieu, en effet, a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils, son unique,
pour que tout humain qui croit en lui ne périsse pas mais qu’il ait la vie éternelle.

L’Église se doit certes d’être universelle, composée de disciples de tous les peuples.
Mais elle se doit surtout d’être continuellement le signe de l’amour universel de Dieu:
aussi, ce sera par leur fidélité à l’amour sans frontières pour le prochain
que les disciples de Jésus feront advenir chaque jour l’unité de l’humanité.
Il est possédé, il déraisonne… (Jn 10,19).
Voilà la conclusion que certains Juifs donnent aux paroles de Jésus
où il se présente comme le vrai pasteur selon le coeur de Dieu.
C’est que la vision de Dieu que prêche Jésus ne peut pas être comprise
de tous ceux qui ne voient Dieu que comme le Tout-Puissant
qui doit châtier les méchants et récompenser les bons.
Une telle vision ne peut concevoir que le Pasteur livre sa vie pour pardonner
au lieu de manifester la sainteté de Dieu en punissant les mal-faisants.
Un tel don de sa vie leur apparaît comme une vision blasphématoire de Dieu:
celle d’un Dieu qui serait faible, désarmé, exposant sa vie plutôt que s’imposant.
Là où Matthieu parle d’un Dieu parfait, Luc nous dit que sa sainteté est miséricorde:
Montrez-vous miséricordieux, comme votre Père est miséricordieux (Lc 6,36).
Et Jésus dira qu’il ne peut donner d’autre signe divin de sa mission
que celui de Jonas, qui est justement le signe de la miséricorde de Dieu (Lc 11,29):
Cette génération est une génération mauvaise; elle demande un signe!
En fait de signe, il ne lui en sera pas donné d’autre que le signe de Jonas.

Jésus ne veut manifester la vérité divine de sa mission de pasteur, de messie,
que par le signe extrême de la miséricorde: le bon pasteur fait don de sa vie.
Dans ce signe, Jésus donne une image de la vraie grandeur selon Dieu,
signe qui -malheureusement- ne peut pas être compris
de ceux pour qui la grandeur est de dominer, fut-ce avec de « bonnes » intentions.
C’est pourquoi ils le diront possédé du démon, inspiré par l’adversaire de Dieu.
Les « pasteurs », responsables des communautés chrétiennes.
Pierre et Paul décrivent les qualités qu’il faut exiger de ces pasteurs:
Prenez soin de tout le troupeau dont Dieu vous a établis les gardiens.
Paissez l’Église de Dieu qu’il s’est acquise par son propre sang.
Je sais bien qu’après mon départ s’introduiront parmi vous des loups féroces
qui n’épargneront pas le troupeau;
de vos rangs surgiront des hommes aux paroles perverses
qui entraîneront les disciples à leur suite
(Ac 20,28-30).
Paissez le troupeau de Dieu qui vous est confié, selon Dieu,
non par contrainte, mais de bon gré, non par cupidité, mais par dévouement.
N’exercez pas un pouvoir autoritaire sur ceux qui vous sont échus en partage,
mais devenez l de la communauté
ne devront donner d’autre signe que celui de la miséricorde:
«Pour aider un frère ou une soeur qui sont en difficulté
une main sur l’épaule est plus utile qu’un coup de semonce».
Les disciples de Jésus n’oublieront jamais
qu’ils n’ont qu’un seul vrai pasteur et qu’ils sont tous frères:
N’appelez personne sur la terre votre Père,
car vous n’en avez qu’un seul, le Père céleste
(Mt 23,8-9).

Georges Convert

»»» Questions

1.Comment Jésus explique-t-il de qui il tient sa mission?
2.Quel est le rôle du pasteur? Quelle est l’origine du mot pasteur?
3.Pourquoi l’image d’un Dieu qui pardonne est-elle rejetée par les chefs religieux?
4.Comment le mot connaître (au sens de la Bible) s’applique-t-il à Jésus et ses disciples?

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