Mon grain de sel

Grain de SelMon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 21 mai 2017

par Mario Bard.

Une demeure nomade-sédentaire

Demeurer … que veut dire ce mot quand, comme moi, on sent bien que le monde est nomade et que tout arrêt porte préjudice à l’Esprit de création? Quand « demeurez » devrait être un exercice intérieur.

Loin de moi de critiquer le fait de « demeurer » quelque part : je suis plutôt casanier ces dernières années et je préfère souvent l’odeur du café de la cuisine à celle des sentiers de la montagne pourtant si proche. Mais, demeurer en Dieu requiert une gymnastique intérieure de l’âme, qui ne pourra jamais faire l’économie du questionnement et d’une continuelle remise en question des acquis. Comment y arriver? Comment ne pas s’ankyloser? Comment rester nomade et sédentaire à la fois?

Je réfléchis beaucoup ces temps-ci sur mon manque de participation à la vie d’une communauté chrétienne. Au mieux, j’ouvre la télé pour l’émission Le Jour du Seigneur le dimanche. Au pire, je me trouve des raisons pour éviter de m’impliquer plus avant. Cette confession pour dire que je désire, d’abord dans le secret de ma chambre, laisser plus d’espace au Dieu-Père et plein d’amour qui veut habiter mon cœur. Celui que, tout au long de l’Évangile, Ieshoua de Nazareth, devenu Christ par la grâce de Dieu et de l’amour, accomplit pleinement. Puis, je pourrai reprendre le chemin d’une communauté chrétienne, comme celle du relais qui correspond si bien à mes désirs et mes façons d’aborder la prière et la réflexion sur l’Évangile. Parce que sans la communauté, outil nomade qui nous oblige à sortir de notre zone de confort, je ne crois pas que je peux demeurer en Dieu. Du moins pas Celui de l’Évangile.

Pour le chrétien et la chrétienne d’aujourd’hui, demeurer en Dieu et dans son esprit de vérité demande une vigilance qui ressemble à celle du coureur de Formule 1 : une erreur, et c’est le mur. Fort heureusement, le Dieu de l’Évangile ramasse nos pots cassés et l’erreur fatale peut être l’occasion de retrouver Dieu ; de nouveau, demeurer en Lui.

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Les membres de la communauté cistercienne de Notre-Dame de Nazareth ont perdu tout dernièrement un des leurs. En effet, le père Thomas est décédé samedi le 13 mai dernier à l’âge de 98 ans et 7 mois, après 75 ans de vie monastique! J’ai beaucoup aimé le court mot qui nous a annoncé la nouvelle. L’Abbé Raphaël a écrit : « … il est retourné paisiblement dans la Maison du Père pour chanter avec le Ressuscité ‘‘Alléluia, victoire sur la mort…’’. » Cette vision de la mort est peu partagée par nombre de nos contemporains. Pourtant pour les chrétiens, celle-ci est totalement en connivence avec l’espérance qui se dégage du témoignage que nous nous transmettons depuis le 1er matin du monde, celui ou Marie-Madeleine à découvert le tombeau vide, qu’elle a vu son Seigneur vivant et qu’elle a annoncé sa résurrection aux apôtres, tous plus ou moins sceptique des paroles d’une femme.

Mais, dans son cœur, Marie-Madeleine sait : c’est bien lui qu’elle a vu. De plus, le tombeau est vide! L’apôtre serait-elle celle qui, malgré la mort du vendredi, est ‘’demeurée’’ dans son Esprit? L’exception qui confirme la règle? Elle aurait pu rester sur la grande frousse de voir Ieshoua vivant, un moment plus épeurant que joyeux. Mais aussitôt, elle se réjouit et court annoncer la nouvelle aux apôtres, cachés et peureux. Ils ne la croient pas. Contre vents et marées, elle défend son point : il est Vivant! Il me semble qu’elle a compris le sens de tout ce qu’il avait dit. Les oreilles de son cœur sont demeurées ouvertes. Elle sait. Tout comme les moines qui demeurent dans l’espérance de la résurrection, malgré la mort d’un des leurs et le corps qui semble dire le contraire.

Et nous, comment demeurons-nous dans l’Esprit que Ieshoua nous a donné? Savons-nous voyager avec lui, nous laisser interpeller par lui, l’écouter? Comment marchons-nous en nomade-sédentaire? Dans le secret de notre chambre haute, nous pourrons répondre à ces questions.

Mario Bard

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