Mon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 15 mars 2020
par Mario Bard.
Savoir reconnaître l’être à la source
Elle vient au puits à midi. C’est pour cueillir la vie. L’eau nécessaire à la survie dans un monde où la source et la rivière ne coulent pas en surface.
Elle rencontre l’homme de Nazareth. Un étranger qui lui semble bien différent des autres et qui ne la juge pas. Elle se raconte à lui et il la devine. Elle lui donne à boire, mais paradoxalement, c’est lui qui étanche sa soif. Elle se laisse aimer comme elle ne l’a jamais été et apprend à recevoir de cet homme qu’elle devine être le Messie, celui que le peuple attend et qui restaurera la justice, la bonté et la loi.
Par contre, il est différent : il n’est pas homme à tout casser. Il est plutôt rempli d’une grande bonté. Cela est nouveau dans le plan de Dieu? Peut-être. Après tout, qui a dit que le Messie devait être un superhomme? Qui a dit que le Dieu d’Israël et des Samaritains devait être un guerrier comme chez les Romains et les Grecs? Des légendes, des histoires populaires chez des personnes découragées par le manque d’amour des dirigeants romains et juifs.
La violence de ce monde et le manque de bonté s’acharnent sur la Samaritaine comme sur les autres êtres humains. Rien n’est sûr et les hommes sont méchants, violents, hasardeux, peu instruits et éduqués. Ils laissent libre cours à leurs fantasmes, même si cela peut tuer la vie et l’innocence. Ils cherchent ailleurs ce qui n’est qu’au fond présent dans un souffle de tendresse et de partage. Ils oublient que la nourriture terrestre ne suffit pas. Le cœur n’est heureux que dans un vrai partage. Il ne survit que dans un silence qui dialogue avec ce Dieu de la tendresse.
Ce Dieu, qui n’est pas comme les autres dieux de l’Antiquité, est un souffle de tendresse qui ose aimer l’être humain et non pas le maintenir en esclavage. Il est un dieu de la joie, du partage et de la paix. Mais, bien sûr, les hautes autorités qui mènent les Empires du monde ne l’entendent pas ainsi. Elles sont occupées à asseoir leur pouvoir et leur première place chez les gens que l’on dit grands. Le partage, l’accueil, la consolation des affligés, la guérison des malades, toutes ces valeurs développées au fil des siècles par des gens qui se sont assis au Puits de Jacob et ont puisé à la source… Des gens qui ont lutté contre l’esclavage et qui ont développé des démocraties sociales, des personnes qui ont osé s’élever contre les injustices pour les politiques publiques tiennent compte des plus petits. Aujourd’hui, elles sont remises en question par des personnes qui leur préfèrent les statistiques, les performances et le pouvoir à tout prix. Elles s’ornent d’or, se servent des religions chrétiennes pour élargir leur pouvoir, médiatise la gloire de la petitesse et de l’envie, pervertisse le sens du bien commun et ne sont bien avec les autres que si elle les domine.
Pourtant, quand la nature qu’ils détruisent à coup de bulldozer ne pourra plus produire la nourriture essentielle à notre vie, que feront-ils? Mangeront-ils les lingots d’or qui auront servi leur fantasme? Auront-ils le cœur en fête? Ou bien seront-ils pleins de regrets et de tristesses? Que seront-ils?
Je veux boire à ta source. Mais, trop souvent, mon cœur reste sourd à ta présence. Apprends-moi à saisir, comme la Samaritaine, qui tu es quand tu viens à moi.
Mario Bard
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