Mon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 21 décembre 2014
par Mario Bard.
Le oui primordial
Quand je lis cet épisode que nous avons lu et relu au fil des siècles, je me demande quoi en dégager. Le côté merveilleux qui me fait retomber en enfance? Ou encore, le côté plus adulte qui fait dire à cette femme qu’est Marie, et en toute liberté : « Voici la servante du Seigneur : qu’il en soit pour moi selon ce que tu as prescrit. »?
Dans ma tentation de devenir trop enfantin ou encore trop adulte et dire un oui de marbre, il y a le milieu. Ce moment où le oui – teinté de l’esprit d’enfance et mature comme adulte – vainc toutes mes tentations de ne plus pardonner, de plus communiquer, de ne plus être humain.
Car, dans la société du choix et de la technologie, il serait facile de me retirer et de mener ma vie, solitaire et autosuffisante. Le surgelé me permet de survivre, et même de vivre depuis qu’ils en ont inventé du sans gras ou du sans sel… Et puis la télévision offre des multitudes de documentaires intéressants qui donnent tous l’impression d’être en vie. Être seul dans une bulle d’illusion semble régler bien des problèmes. Mais, le messager demande un oui qui engage. Libre certes, mais il en attend un.
Et si Marie avait dit non? Si Marie avait décidé de rester dans sa bulle? Gabriel serait probablement allé ailleurs. Il lui fallait un oui. La vie de Dieu en dépendait. Et elle en dépend encore.
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Rien de plus vivant que le oui à Dieu. Rien n’est jamais fini. Rien n’est figé, arrêté. Les clowns télé-évangélistes qui disent à cœur de jour que la fin du monde est proche bloquent tout et ne veulent plus que Dieu crée et se révèle dans les découvertes humaines qui, au fil des siècles, nous émerveillent.
Il croit que le oui de chaque jour n’est plus suffisant. Cette liberté du oui, ils ne la veulent pas. Ils espèrent le retour du Christ sur un nuage d’argent, jouant des trompettes de triomphe contre les méchants. Ils espèrent que tout s’arrête. Quel cynisme! Et quel manque de liberté! Cela ne ressemble pas à Marie de Nazareth. À son oui primordial. C’est le oui à un enfant, un oui à la vie que le Seigneur Dieu veut.
Dieu a fait sa place au cœur du monde parce que Marie a dit oui. Elle a osé.
Et si moi aussi, j’osais le oui primordial : que ce passerait-il?
Par exemple, aux confins de mon quotidien parfois si anodin. Un sourire, une porte ouverte, un bonjour, un nez de clown pour faire rire, une parole dite pour réconforter.
Ces gestes n’ont rien d’éclatant. Le chèque du patron d’une grande corporation donné à un organisme de charité est certes important et éclatant. Est-il toujours aussi désintéressé que les gestes quotidiens? Seule la conscience du donneur peut nous le dire.
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Le oui de Marie n’éclatera que sur la croix. C’est un être humain que les chrétiens croient être le Fils de Dieu. Il est un don total et pardonne même au bon larron qui se présente à lui en dernière instance. Notre oui primordial n’a rien d’anodin. Et même s’il peut parfois nous sembler sans issue, sans lendemain et sentimentalement vide, le méditer une fois par jour nous permet de retrouver cet élan. Parce qu’au cœur du Dieu de l’Évangile, il est une source vive.
Dans le oui de Marie, il y a tout de l’élan de confiance de l’enfant dans son père et sa mère, et tout de la maturité d’une femme adulte qui comprend les Écritures saintes de son peuple avec une affinité de plus en plus aiguisée.
L’Annonciation? Une occasion d’affiner notre oui primordial à Dieu.
Mario Bard
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