Mon grain de sel

Grain de SelMon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 10 juillet 2016

par Mario Bard.

Un bonheur sur le bord du chemin

Être le bon samaritain de l’inconnu, de celui ou celle que nous ne connaissons pas. Prendre le temps d’aider, de soutenir l’étranger et lui donner les premiers secours. Voilà un épisode de l’Évangile extrêmement déroutant. Un appel à suivre Dieu qui ne ressemble pas à un cours de morale ou bien à un traité de théologie. Concret, précis, loin des honneurs des facultés ou de la Chaire. Bref, l’appel de Ieshoua n’est pas d’abord une religion précise avec des codes, des liturgies, des édifices magnifiques ou des rassemblements intenses et spectaculaires.

Non que tous ces éléments soient inutiles. Au contraire. L’esprit religieux de l’être humain a besoin de ces signes extérieurs pour nourrir sa foi. Mais, ils ne sont que des outils, des éléments – certes probablement essentiels –, mais le vrai essentiel, le cœur de la religion doit être d’abord vécu dans la rencontre avec l’autre, et dans le service que je peux lui rendre à tout moment.

Le cœur de la tradition chrétienne est d’abord planté dans le service.

Désintéressé, patient, confrontant, utile, joyeux, libre, etc. Je pourrais utiliser tous les mots qui décrivent les plus grands saints comme Vincent de Paul, Marguerite d’Youville ou même Thérèse de Lisieux. Malgré les murs de son couvent et de sa vie consacrée, elle avait découvert que c’est dans l’amour que nous mettons dans chacun des petits gestes de service que se trouve la clé pour entrer dans le cœur de Dieu.

« Elle multiplie les petits actes de charité et d’attention aux autres, rendant de menus services, sans les signaler », nous écrit l’un de ses principaux biographes, Mgr Guy Gaucher. « Elle accepte en silence les critiques, même celles qui peuvent être injustes et sourient aux sœurs qui sont déplaisantes avec elle. Elle essaie de tout faire, y compris les plus petites choses, par amour et avec simplicité»

Voilà, me semble-t-il, le cœur du christianisme. Le reste est essentiel tout en étant superflu. Présent pour nous donner la force d’aller au service des autres, même de l’étranger.

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Mon petit papa est décédé le 18 juin dernier. Parmi ses hauts faits d’armes… rien de vraiment spectaculaire. Sinon qu’il a souvent, énormément rendu service. Je me souviens, quand j’ai commencé à faire du théâtre en quatrième secondaire. J’avais 15 ans, pas encore mon permis de conduire, et il m’amenait à 15 minutes de voiture. Puis, il revenait me chercher, trois heures plus tard.

J’ai longtemps tenu pour acquis ce que les parents faisaient pour nous. Puis, petit à petit, je me suis rendu compte que papa le faisait parfois à contrecœur. Non qu’il ne m’aimait pas. Mais, après une journée de travail, se taper deux soirs de semaines en voiture pour son garçon qui entretenait des ambitions théâtrales, et ce pendant au moins deux mois… Un geste de service désintéressé qui m’impressionne aujourd’hui.

Ces dernières années, ce sont de purs étrangers qui ont pu profiter de cet esprit, grâce au partage qu’il préparait. Et, si le service humain n’est jamais complètement désintéressé, la tension – au sens de cœur tendu – allait dans le sens de la gratuité et du don.

Merci, papa, de m’avoir appris ce désintéressement qui rejoint aujourd’hui celui du Bon Samaritain. Je suis encore loin de ton exemple, mais chaque jour, j’essaie d’entrer dans cet esprit de gratuité. Celui qui tue la solitude et rend capable d’aimer.

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Les chrétiens sont des gens chanceux. Non qu’ils soient meilleurs que les autres ou plus intelligents. Mais, je crois que la rencontre qu’ils font avec Ieshoua, à travers les Évangiles, les rencontres communautaires et le service à leur société, fait en sorte qu’ils se sentent heureux.

Ce que j’espère?

Que chaque chrétien prenne conscience qu’il est d’abord, avant même une quelconque notoriété due à sa rencontre avec le Christ Ieshoua, un Bon Samaritain. Cet étranger essentiel qui risque sa richesse, sa réputation et perd son temps à aider le prochain qui est sur le bord du chemin. Là réside notre plus grand bonheur.

Mario Bard

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