Mon grain de sel

Grain de SelMon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 13 novembre 2016

par Mario Bard.

Un faux prophète? Vite, d’abord prions

Prendre des risques pour changer le monde, transformer la terre, laisse entrer dans cet univers tout l’amour qu’il faut pour nourrir notre âme légère… Rien n’est pareil à un être humain. Pas même les cathédrales d’Amiens, de Chartres ou de Paris réunis. Non que je les déteste, au contraire!

Demandez à mes amis. Ils savent que je pourrais passer des heures à marcher autour et dans ces monuments extraordinaires. Construits dans un élan de foi, ces vaisseaux de prière et de connexion avec l’univers sont magnifiques et je considère qu’ils sont aussi importants que mon supermarché du coin de la rue. Bien sûr, il importe qu’ils soient nourris d’un amour plus grand que soi, qui nous élève.

Mais, les temps modernes nous ont aussi appris que, peu importe l’endroit, notre corps peut aussi devenir un temple. Dans les massacres qui sont devenus habituels – Shoah, Rwanda, Irak et Syrie –, de nombreuses personnes réussissent à trouver la lumière malgré tout. Je pense à Etty Hellisum dont le journal personnel est devenu une source d’inspiration pour tant de gens, alors qu’elle se trouve au milieu d’un camp de la mort allemand. Des millions de gens lui doivent tant, parce qu’elle a su voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide.

***

J’ai l’impression de vivre un mauvais rêve, presque un cauchemar. Un faux prophète a été élu sur la terre des voisins d’à côté. Un homme au discours facile et à l’instinct franchement discutable – 5-6 faillites en carrière – a été élu pour diriger la plus grande puissance du monde post-moderne.

Comment pourrons-nous passer à côté de ces illusoires pensées magiques? Pourquoi tant de gens se sont-ils laissés berner? Soyons bons joueurs; peut-être deviendra-t-il plus sage en foulant le sol de la Maison-Blanche. Mais, pourquoi mon cœur en doute-t-il autant?

Sa voix de faux prophètes – « je ramènerai des jobs à la pelle et je ferai l’Amérique grande again » – résonne comme une cymbale fausse. Les gestes qu’il a lui-même faits dans son entreprise vont à l’encontre de ce qu’il dit. L’acier de ses tours? Acheté en Chine au bas prix. Les casquettes portées par ses partisans lors de ses innombrables rallyes? Fabriquées en Chine… L’art de dire le contraire de ce que l’on fait, érigé en triomphe!

Et puis, l’arrogance, les propos racistes et non fondés envers les millions de Mexicains cherchant refuge aux États-Unis, ou encore, la manière de parler des femmes et de les considérer comme des jouets faciles à exploiter…

Oui, s’il n’est pas un faux prophète de type religieux, l’homme aime faire croire aux illusions magiques : je ferai cela, et cela, et cela et cela, pour vous… entouré de drapeaux du pays, de phrases creuses et vagues… Pendant ce temps, les pauvres n’ont plus rien à manger, plus rien pour s’éduquer, plus rien pour être heureux, sinon que des téléréalités mauvaises et fades à la télé… Est-ce le faux prophète de la téléréalité qui se présente aux élections? Alors, je vote pour lui. La question? Je n’ai pas le temps, je dois travailler, manger, dormir, travailler, manger, dormir. Oh, je dois aussi écoute la téléréalité…

***

Les réseaux sociaux débordent ce matin de découragements à la suite de l’élection d’un faux prophète politique comme président du pays le plus puissant du monde.

Un ami a mis sur son mur cette citation :

« Il vaut mieux que le poète s’arrache la langue plutôt que de rendre hommage
à bestialité par son art ou sa simple indifférence.
Si le totalitarisme est assez puissant pour fermer la porte à toute dénonciation, toute satire,
que le poète se retire et que le savant cesse de gloser
sur les classiques à quelques kilomètres des camps de la mort.

Précisément parce que la parole est l’insigne de la condition humaine,
qu’elle fait de l’homme une créature d’inquiétude et de recherche,
le langage ne devrait trouver ni vie ni repos dans les hauts lieux de la cruauté.
Le silence est vraiment une alternative.
Quand la cité éructe la sauvagerie et le mensonge,
rien ne porte plus loin que le poème non écrit :

“Maintenant, les sirènes disposent d’une arme plus fatale encore que leur chant,
écrivait Kafka dans ses Paraboles, leur silence.
Et bien qu’on imagine mal une telle chose,
quelqu’un peut-être a rompu le charme de leurs voix; mais celui de leur silence, jamais.’’ »
(Georges Steiner, Le langage et le silence)

Nous survivrons au faux prophète. Dans quel état, je ne sais pas! Mais comment? Prions pour que la paix envahisse d’abord notre cœur. Sûr de son amour et fort de notre foi énonce une prière. Prions le Dieu de l’Évangile de nous soutenir dans la paix de sa mort-résurrection. C’est par notre persévérance que nous vivrons.

Mario Bard

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