Portraits selon Luc: Zachée

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Au début du mois de décembre dernier, nous sommes entrés dans l’année liturgique C, celle consacrée à l’évangéliste Luc. Cet évangile présente une grande abondance de paraboles, celles parmi les plus citées dans les cercles des assemblées chrétiennes. Le texte de Luc met en scène des lieux de rencontre où se tissent des relations. La Bible nous parle de l’Alliance. Une alliance que Dieu cherche à établir avec les humains et invite ces humains à faire de même les uns avec les autres. C’est découvrir un évangile qui est assez près de nous, citoyens urbains du 21e siècle.

Chez Luc, le Royaume est présenté comme un dynamisme. Il faut se dépoussiérer de notre vieille image de Dieu et accepter d’entrer dans ce dynamisme. Un dynamisme qui nous propose d’entrer en relation et de prendre  la responsabilité d’entretenir cette même relation. Jésus n’est pas venu nous apporter un code pénal qu’il faut apprendre à réciter et appliquer. Il est davantage venu pour établir une relation. Il est avec, donne sa miséricorde, libère, relève, accompagne. Il nous invite, après nous avoir mis en contact avec la miséricorde, avec le don, d’entrer dans la danse, afin, qu’à notre tour, nous devenions créateur d’un dynamisme d’alliance.

Dans les trois prochaines semaines, nous vous proposerons chaque dimanche un nouveau portrait, afin de vous démontrer cette même dynamique à l’œuvre dans l’évangile de Luc.

Bonne lecture!


Jésus accueille Zachée

par Étienne Godard

L’épisode de Zachée, au début du chapitre 19 de l’évangile de Luc, démontre bien comment la relation à l’autre, lorsqu’elle se fait dans la bienveillance, est un tremplin fabuleux pour nous sortir de l’errance, pour nous rappeler à notre vocation de fils et de filles de Dieu.

Dans la vie de Zachée, il y a visiblement une grande coupure qui marque sa rencontre avec Jésus. À Jéricho, le texte de Luc nous dit que Zachée occupe un poste bien en vue. Il occupe une position économique fortunée dans une région sous occupation romaine: il est chef des percepteurs d’impôt. Dans les évangiles, on leur donne le nom de publicain. Ils sont perçus comme des collaborateurs avec l’occupant romain. Zachée fait un sale boulot au sein de la communauté juive: il collecte les lourds impôts décrétés par les occupants. Il doit certainement en faire bon profit. Les publicains ont la réputation de prendre plus d’impôt que ce qui est requis par l’occupant romain. Pour les autres membres de la communauté juive, il n’est certainement pas recherché d’être vu, par les autres, en compagnie d’un publicain. Face au judaïsme, il est considéré comme impur, il travaille avec des étrangers, des non-juifs. Il ne doit pas être bien vu par les pharisiens, qui déplorent d’ailleurs que Jésus mange avec eux. Si Dieu est au Temple, il peut lui être difficile d’y avoir pleinement accès. Il doit certainement multiplier les dépenses pour les sacrifices et les dons dans les troncs du Temple pour se faire un peu pardonner!

Visiblement, malgré son opulence, Zachée est malheureux dans le rôle qu’il joue. Je dirais qu’il est dans l’errance. Avec sa communauté, les liens, les relations sont coupées: il le ressent dans le lourd regard culpabilisant des autres, de l’autre qu’il croise au marché, à la synagogue, au bain public. Il souffre de son enfermement.

Zachée a certainement entendu parler de Jésus. De son discours accueillant, de ses paroles qui libèrent, de sa bonté, de sa miséricorde. Il cherche donc à le voir. Le texte de Luc l’exprime bien: il court pour être en avance et monte sur un arbre pour le voir. Entrant dans la ville, Jésus lève les yeux et voit Zachée. Aussitôt, il lui demande de descendre, car il doit habiter dans sa maison. Zachée le cherche et Jésus va à sa rencontre. Que Zachée, dans le village qu’il visite, ait une si mauvaise réputation, n’empêche pas Jésus d’aller vers lui. Pour Jésus, Zachée est un homme, un fils du Père. Il est à sa ressemblance, fils d’Abraham. Il répond à l’attente de Zachée dans sa demande de relation.

Jésus l’appelle par son nom, il suscite en lui son potentiel d’humanité. Dans la tradition biblique, nommer, c’est un acte créateur. Que Jésus nomme Zachée par son nom, c’est le transformer. Jésus veut demeurer chez lui, annonce-t-il. À la foule présente, il montre, il affirme, qu’il se fait près de lui. Ils se parlent d’humain à humains, de fils d’Abraham à fils d’Abraham. Le regard de Jésus fait plonger Zachée dans ses profondeurs. Zachée, au milieu de la foule, est remis debout!

Par ces gestes de proximité, de bienveillance, d’accueil inconditionnel, Jésus crée un espace de sécurité pour Zaché. Très certainement, comme chrétien, nous sommes invités à poser un regard parallèle à celui de Jésus sur les personnes que nous côtoyons. Je cite Lytta Basse qui écrit: « Quand nous posons sur une personne ce regard de compassion qui la restaure dans son être nous incarnons Son Regard, souvent sans le savoir, nous la voyons telle qu’Il l’a créé: un être structuré par l’ouverture à autrui, un être fait à sa ressemblance, c’est-à-dire de la même étoffe compassionnelle que lui. Tel était le regard de Jésus sur ses contemporains.

Étienne Godard

  1. Suzanne Lavigueur

    Une réflexion inspirante, libérante, sur la rencontre de Jèsus avec Zachée, uneréflexion qui nourrit l’espérance. Merci de l’avoir partagée!

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