Mon grain de sel

Grain de SelMon grain de sel, sur l’Évangile du dimanche 10 février 2019

D’abord, se laisser aimer par Lui

Les eaux, lieux de la mort dans nombre de récits bibliques, sont pourtant source de vie dans ce récit, puisque la nourriture est abondante! Pierre est plus qu’étonné : il tombe à genoux devant Jésus et, saisi par ce qu’il vient de réaliser, il reconnaît Jésus comme un maître – son maître – un homme qui est plus que l’ordinaire fils du charpentier de Nazareth. Mais, que l’homme qui est le fils du charpentier de Nazareth…

La culture populaire a créé beaucoup d’éléments très colorés autour de l’apôtre Pierre. Un homme qui semble être à la fois bourru, colérique même, mais aussi bon vivant, revanchard, prompt, à la fois paresseux et travaillant, aimant bien une petite touche d’alcool la plupart du temps. Du moins, c’est l’image que je m’en suis faite à partir de celles trouvées dans les peintures, dans les films et dans les livres. Probablement bâties à partir de ses nombreuses réactions, vives et subites, que l’on retrouve dans les Évangiles. Et contrairement à l’idée qu’un pêcheur était un pauvre homme, le métier était honorable selon les spécialistes de l’histoire de cette région, laquelle se trouve aux carrefours de plusieurs grandes routes commerciales, près des territoires païens et loin de la ville sainte : Jérusalem. Pierre devait être un homme reconnu comme quelqu’un d’important pour sa communauté.

Jésus est lui aussi né dans cette région qui se trouve aux croisements de cultures. Alors, on peut supposer qu’il connaît la diversité des manières de faire des tribus et qu’il connaît aussi les croyances qui ont tissé cette région. Peut-être avait-il saisi en lui que tous les hommes et toutes les femmes ont un droit égal à la dignité, ce que les officiels de sa religion refusaient d’accorder sous toutes sortes de prétextes. Un être humain, certes, mais le peuple élu ne peut-être entaché par l’arrivée de gens qui n’ont jamais connu le Dieu d’Israël, ou encore, qui ont des pratiques culturelles différentes des nôtres. La vision qu’ils ont de l’autre est réductrice.

Comme celle qu’on eue dans l’histoire du monde certains officiels des Églises chrétiennes ayant parfois adoptés ce modèle et forcés la conversion de certaines tribus et de certains peuples. L’Amérique centrale est un modèle patent, avec sa conquête barbare. Et que dire du modèle adopté ici au Canada? La langue du blanc était considérée comme supérieur, donc, interdiction pour les enfants de parler leur langue maternelle. Quand ils retournaient dans les villages après quatre mois passés au pensionnat, ils ne comprenaient pas leur langue maternelle, donc, ils ne comprenaient plus leur parent! Les dommages sont encore bien présents, 150 ans plus tard, dans les communautés autochtones du Canada. On parle même de génocide culturel.

Pour pêcher de l’Homme, il faut d’abord respecter l’humain. Le sortir de la mort requiert du pêcheur l’humilité d’écouter le fils, le père et l’esprit. Et de laisser les poissons venir à soi, sans forcer, en apprenant de l’autre. L’humilité également de vivre avec, comme, en tant que. Et non de manière supérieure et arrogante. La pêche requiert de la patience afin que chaque être humain puisse atteindre le meilleur en lui. Et la pêche n’est pas d’abord une histoire de conversion. C’est une histoire d’amour.

Sortir l’être humain des eaux de sa propre mort est un défi que doivent d’abord relever les chrétiens en eux-mêmes. Ils peuvent ensuite devenir apôtres, pêcheurs d’Hommes et de Femmes : pêcheurs d’êtres Humains. Mais, comme celui de Pierre, le chemin le plus difficile à parcourir se trouve en soi. Laisser entrer Ieshoua dans le cœur de notre cœur et le laisser nous aimer au point de devenir, en toute humilité et pleinement conscient de sa propre humanité, Porteur de Bonne Nouvelle est le défi qui se pose à soi.

Mario Bard

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