Regards croisés

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Un repas le jour du shabbat

Il y a deux parties dans ce texte de Luc. Premièrement la guérison qui suit la question de Jésus sur la possibilité de guérir, donc de donner le salut, le jour du shabbat. Dans le récit de la Genèse, il est écrit que Dieu se reposa le septième jour de la création. Ce septième jour de la semaine, que la tradition juive appelle le shabbat, est un jour de repos pour les juifs religieux, un jour consacré au repos, au rassemblement familial et à la prière. Il est interdit d’y accomplir tout travail. D’où cette question de Jésus aux autres membres assis autour de la table, est-il permis de guérir le jour du shabbat? Ce n’est pas la première fois que Jésus contrevient à cette règle.

Guérir une « recréation »

Pour Jésus, si le shabbat est le jour réservé à Dieu, cela en fait un temps particulier pour délivrer un humain de ses nœuds qui l’empêche de vivre pleinement sa vie d’enfant de Dieu. De le libérer, de le remettre debout. De lui accorder le salut. C’est ce que nous apprend le commentaire de la Tob sur cette question, qui nous renvoie à la note L du chapitre 13, verset 16. J’emprunte un verbe à Georges Convert. Guérir pour Jésus, c’est accomplir une « recréation ». C’est ainsi s’insérer sur le chemin du Père qui nous offre, tout au long de nos vies, la possibilité de participer à sa création. C’est ce que Jésus fait dans le texte que nous avons sous les yeux. Pour le Nazaréen, la tradition héritée de ses pères n’est pas une machine infernale à reproduire des clones, mais une puissance de sagesse présente aujourd’hui pour les défis de son temps. Ce n’est pas un système aveugle, mais un arbre qui croit.

Le repas, un lieu de transmission

Avant d’aborder la seconde partie, j’aimerais que l’on se rappelle que nous sommes ici à l’intérieur d’un repas. Luc manie bien cet environnement (7,36 et 11,37). Jésus y semble à l’aise. Il faut dire que le repas est un lieu de transmission par excellence où se tissent les liens forts.. C’est souvent assis autour d’une table, en partageant un repas, que se décident nos grandes orientations, que nous les partageons. C’est autour d’une table que j’ai demandé ma femme en mariage. La table est un lieu qui sied bien pour nous partager le chemin qu’il propose de parcourir. C’est un chemin d’accueil, d’humilité et de service. Un chemin où règne la gratuité et où les relations sont construites sur l’amour.

C’est sous cet angle que nous devons aborder la deuxième partie du texte. Dans toute la bible, quand Dieu ou Jésus nous parle du monde à venir, souvent ils le présentent sous la parabole d’un banquet. Ce banquet, c’est cette grande table où tous les convives prennent place. Ces pharisiens, qui se bousculent pour prendre la première place ne cadrent pas très bien avec l’image du banquet messianique où les premiers appelés risquent de faire grincer les dents aux convives assis à la table avec Jésus. Il les invite à voir autrement. À intégrer une autre manière d’entrer en relation. Georges parle à merveille de cette nouvelle relation à laquelle nous sommes appelés comme chrétien.

Il s’agit ici de la vraie mesure de l’amour, de la possibilité d’aimer ou de ne pasaimer. Il s’agit du rôle de l’Église, de sa communauté, de ce qu’elle doit être pourêtre signifiante de l’amour de Dieu. Il s’agit finalement de la mesure de notre bonheuret de notre bonheur éternel. La joie que Dieu veut nous donner sera toujoursau-delà de tout ce que nous pourrons mériter; au-delà de tout ce que nous pourronsespérer. La relation vécue avec notre prochain sera la mesure de notre joie éternelle.Si nous sommes habitués à tout calculer de ce que nous donnons et de ce quenous recevons, notre cœur ne sera pas habitué à vivre la gratuité de Dieu.

Georges Convert

Étienne Godard

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