Regards croisés

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L’Avent : un visage de Dieu qui se dévoile

L’intervention de Dieu dans l’histoire humaine, comme le suggère l’histoire de Noé, est une idée fréquente dans la Bible. Il est clair, en la lisant, que, un jour, Dieu triomphera du mal. Ce sera, écrit Georges, « le Jour du Seigneur ». Pour les Juifs du temps de Moïse, on ne peut pas imaginer un Dieu qui n’interviendrait pas dans l’histoire pour faire triompher le camp des justes. « Si Dieu intervient dans l’histoire, cela veut dire qu’Il veut la mener à son terme: la victoire sur toutes les forces du mal, » nous explique-t-il. C’est ainsi qu’il faut voir le récit de Noé. L’intervention d’un Dieu tout puissant qui fait justice.

Le texte de Matthieu, cette semaine, nous présente Jésus qui cherche à répondre à la demande de ses disciples : quand et comment arrivera cette fin de l’histoire et le retour du fils de l’homme, comme, semble-t-il, Jésus aimait bien s’appeler. La seule réponse qu’ils auront c’est qu’il n’en sait rien! « Tenez-vous donc prêts, vous aussi : c’est à l’heure où vous n’y penserez pas que le Fils de l’homme viendra. » Même le maître de la maison ne sait pas quand le voleur viendra! Entre Moïse et Jésus, entre le récit de Noé et celui du bon Samaritain, la représentation de Dieu à muer. Du Dieu tout puissant qui fait surgir le déluge pour venir à bout du mal, le Dieu de Jésus, en prenant l’humain comme représentation, comme lieu d’incarnation, revoit sa manière d’être au monde, sa présence dans l’histoire humaine. 

Ce texte de Matthieu nous fait entrer dans la première semaine de l’Avent. L’Avent est la période qui précède la venue de Jésus. Matthieu y insiste particulièrement sur une chose : la veille.  «Veiller et prier », pourrait-on résumer. Veiller et prier pour nous préparer à cette rencontre. Cette rencontre que nous présente, chaque année, la liturgie chrétienne est une synthèse des rencontres que nous avons tout au long de notre existence avec Jésus. Veiller et prier, parce que nous ne savons jamais où et quand cette rencontre va se produire. Pour moi, c’est ce qu’il cherche à dire à ses disciples, sans les effrayer, en maniant le langage dans lequel ils baignent. Ils seraient incapables d’en comprendre un autre. Tout comme Jésus lui-même, qui baigne dans la même réalité qu’eux.

Comme chrétien, qui recherche cette rencontre, nous multiplions les occasions pour qu’elle advienne. Toutes nos vies nous appellent à chercher Sa Présence. Cette rencontre s’installe souvent par le dialogue intérieur. Un mot, une phrase qui, tout à coup, regorgent de sens dans une lecture, une homélie, une discussion au coin d’une table. Il faut souvent du temps pour laisser cette parole murir. Un temps, afin que le bruit originel prenne sens. Souvent il nous faut attendre le reflet d’un autre pour que la lumière surgisse. Nos temps de prière servent à ouvrir une porte, partir en pèlerinage, c’est ouvrir une nouvelle porte. Ce sont nécessairement des veilles où nous nous donnons le temps de tendre l’oreille, de nous ouvrir au dialogue. Il faut s’approprier ces veilles dans nos vies.

Jésus est venu pour nous accompagner, pour nous inviter à suivre un chemin de vérité. Y mettre un éclairage, y mettre du sens, de l’espérance, de la lumière, du liant. Il n’est pas venu pour dévoiler le futur. Il n’est pas venu pour nous retirer cette vie dont la Création nous a pourvus. Dévoiler le futur mettrait à mort l’ici et le maintenant, mais aussi toutes les possibilités de retour à la vie que l’on croise sur nos chemins. Ces possibilités forment notre espérance, le moteur de nos vies.  Chercher à connaître le futur serait s’approprier l’ultime puissance : la connaissance et la maîtrise du temps, alors que la vie est construite de nos attentes, de nos espérances.

Cette veille, ces prières nous permettent de découvrir ce courant dans lequel nous baignons tous. D’y reconnaître les liens qui nous tiennent sur son chemin, sur notre chemin. Elles renouent l’appel du Tout Autre dont parle le premier Testament. IL y était venu nous initier à son Alliance. Jésus nous renouvelle cette invitation à faire Alliance. Notre futur dépendra de la manière dont nous aurons tissé nos jours. Ces moments, ces saveurs, n’avaient-ils pas un goût, une essence qui nous a fait sortir de nous même, un goût d’éternité? Il faut savoir en suivre le chemin pour y reconnaître l’Esprit à l’œuvre dans notre vie.

Le disciple de Jésus n’est ni un pessimiste ni un optimiste. Il est appelé à devenir un être d’espérance, certain que chaque humain peut progresser de l’égoïsme vers une plus grande solidarité, mais sachant aussi que tout cela ne peut se faire qu’à travers les combats quotidiens de la bonté et du pardon. Cette vision du monde est-elle réaliste? La justice est déjà difficile… mais la bonté sans exclusion ni condition…? Pour Jésus, c’est la bonté généreuse qui sauvera le monde, qui achèvera la construction du monde tel que Dieu le veut. Et Dieu se propose de vivre avec nous cette bonté chaque jour, dans le quotidien. L’espérance du disciple de Jésus vient de sa communion avec Jésus, le Fils de l’Homme, qui est ressuscité: c’est-à-dire qui a triomphé dans sa propre vie des forces du mal et de la mort.

Georges Convert

  1. marcel gaucheron

    Merci beaucoup pour ce complément d’analyse très utile et enrichissant
    Bien fraternellement

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