09 Mar

Paul, l’Apôtre qui estimait les femmes

Quelques textes de Paul lui ont valu la réputation d’un misogyne : « Que les femmes se taisent dans les assemblées. » (1 Co 4,34-35). Voilà pourquoi la femme doit avoir sur la tête un signe de soumission, à cause des anges (1 Co 11,5-10). Que les femmes « soient soumises à leur mari » comme au Seigneur (Ep 5,21-28). Cette réputation est largement injuste !

Les textes cités pour justifier la misogynie de Paul doivent être replacés dans leur temps. Les psychanalystes ont cru déceler l’absence de la mère chez Paul et le poids du père symbolisé par la Loi qui écrase. Ce sont là des clichés. Évoquons, parmi d’autres, deux textes qui soulignent la dimension maternelle de Paul: «Nous sommes devenus des enfants au milieu de vous, comme une mère qui prend soin de ses propres enfants. »* (1 Th 2, 7). L’Apôtre se présente, disponible et simple comme un enfant,à la différence des pseudo-apôtres, charlatans intéressés. Paul se compare à la nourrice qui nourrit les enfants dont elle a la charge. Il se sert d’une autre métaphore maternelle, en se comparant à la nourrice qui nourrit ses enfants de son lait. « C’est du lait que je vous ai fait boire, non de la nourriture solide : vous ne l’auriez pas supportée. Mais vous ne la supporteriez pas davantage aujourd’hui. », (1 Co 3,1-2). Paul parle peu de sa famille. Les Actes évoquent le fils de sa soeur qui le prévient qu’un guet-apens se prépare contre lui (Ac 23, 16). Paul invite à saluer « Rufus, cet élu dans le Seigneur, et sa mère qui est aussi la mienne. » (Rm 16,13). Il a peut-être trouvé auprès de cette femme une affection qu’aurait pu lui donner sa mère si elle avait été vivante.

De nombreuses collaboratrices

La grande famille de Paul ce sont ses collaborateurs, hommes et femmes. Paul a connu la situation des femmes émancipées dans la diaspora juive.

La pratique et l’enseignement de Jésus lui ont apporté des raisons supplémentaires d’ouvrir la mission aux femmes.

Lydie, une commerçante de Philippes (Ac 16,13-15) rencontrée avec d’autres femmes au bord de la rivière l’accueille dans sa maison. Dans le couple Prisca et Aquila, avec qui Paul travaille, la femme est souvent nommée en tête: c’est le signe qu’elle avait le rôle premier dans l’évangélisation. C’est elle qui complète la catéchèse imparfaite d’Apollos (Ac 18,26). Paul la présente, avec son mari, comme « des collaborateurs en Jésus Christ » (Rm 16,3). Ce terme est utilisé pour qualifier les premiers acteurs de la mission autour de Paul. Chloè, une chrétienne de Corinthe, avertit Paul de certains désordres graves dans la communauté : cela suppose une  autorité, peut-être un ministère, certainement la confiance de Paul (1 Co 1,11) ; de même pour «Phoebé, notre soeur, ministre de l’Église de Cenchrées…protectrice pour bien des gens et pourmoi-même.» (Rm16,1-2) ; «Marie qui s’est donné beaucoup de peine pour vous.» (Rm16,6), Evodie et Syntyché que Paul cherche à réconcilier «car elles m’ont assisté dans la lutte pour l’Évangile» (Ph 4, 2-3).

“Désormais, il n’y a ni homme ni femme…”

Dans la durée, des femmes ont peiné sous la direction de Paul. Cette fidélité ne se comprendrait pas si Paul étaitmisogyne! Pour lui, le message de Jésus bouleverse les relations entre les hommes et les femmes. Désormais, c’est dans le Christ que ces relations doivent être vécues : « Il n’y a ni juif, ni grec, ni esclave, ni homme libre, ni homme ni femme. Car vous ne faites qu’un dans le Christ Jésus. » (Ga 3,28).

* D’autres manuscrits disent « nous sommes devenus pleins de douceur. »

Père Alain Marchadour, bibliste

in Prions en Église (France) Mars 2009